Obama veut éviter le recours à la force en Syrie
Mots clés : Etats-unis, crise, protestations, SYRIE, Bachar El-Assad, Barack Obama
Par Laure Mandeville
27/04/2011 | Mise à jour : 18:40
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Face à la répression déployée par le régime syrien,
qui a fait plus de 500 morts, Obama se prépare à mettre en place «des
sanctions ciblées» contre Damas.
Crédits photo : Pablo Martinez Monsivais/AP
Déjà engagée à reculons dans l'aventure militaire libyenne,
l'Amérique n'a aucun «appétit» pour une approche musclée face à la
Syrie. Jusqu'ici, la Maison-Blanche s'était contentée de condamner la violence et d'appeler Bachar el-Assad à la réforme, suscitant maintes critiques dans les mouvements de défense de droits de l'homme. «Où est le président?», s'indignait sur son blog l'expert de politique étrangère néoconservateur Elliott Abrams,
ex-membre de l'équipe Bush. Mais face à la répression déployée par le
régime, qui a fait plus de 500 morts, l'Administration Obama se prépare à
mettre en place par décret présidentiel «des sanctions ciblées» contre
Damas. Celles-ci pourraient toucher les comptes bancaires de la famille
el-Assad, limiter leur capacité à voyager et leur interdire tout
commerce avec les États-Unis. L'ambassadeur syrien a par ailleurs été
convoqué au département d'État, où devait lui être demandé un arrêt des
violences. Cette agitation diplomatique et ces annonces de
sanctions cachent toutefois mal l'embarras de l'Amérique et sa relative
impuissance face au bain de sang. S'il a dénoncé vendredi avec force
«l'utilisation révoltante de la violence pour écraser les
protestations», Barack Obama s'est bien gardé d'apparaître en public
pour demander le départ d'el-Assad, contrairement à ce qu'il avait fini
par faire pour Moubarak en Égypte et pour Kadhafi en Libye.
Ses collaborateurs annoncent un discours imminent sur le dossier
syrien, mais son porte-parole Jay Carney a pris le soin d'établir une
distinction claire, quoique pas totalement convaincante, entre la Libye,
«un cas unique», et la Syrie. Déjà engagée à reculons dans l'incertaine
aventure militaire libyenne pour empêcher une «catastrophe
humanitaire», l'Amérique n'a en effet aucun «appétit» pour une approche
musclée face à la Syrie. Les difficultés rencontrées par l'Otan face aux forces de Kadhafi
ne donnent pas vraiment envie d'aller tester la solidité d'autres
dictateurs. Et l'Amérique a déjà fort affaire en Irak et en Afghanistan.
La mosaïque syrienne De
plus, si elle n'a pas de sympathie pour le régime de Bachar el-Assad,
sponsor du terrorisme et facteur de déstabilisation de la région, à
travers ses alliés du Hezbollah et son alliance de circonstance avec
l'Iran, l'Administration Obama sait qu'une déstabilisation de la
mosaïque syrienne serait un saut dans l'inconnu, peut-être pour le pire.
Les Israéliens, qui, malgré des tensions sur la question du Golan, ont
établi une sorte de modus vivendi avec el-Assad, semblent encourager la
prudence, redoutant l'avènement d'un pouvoir islamiste radical.
«Plus réaliste et pragmatique qu'idéaliste, l'Administration Obama a
tendance à redouter les changements géopolitiques», ce qui l'amène à
hésiter dans son soutien aux mouvements de révolte, note un
éditorialiste. Le nouveau président américain a en réalité été
pris à contre-pied sur le dossier syrien, où il avait amorcé un virage
par rapport à son prédécesseur, renvoyant un ambassadeur à Damas en
janvier après des années de gel des relations. S'alignant sur la
démarche française, Obama espérait qu'une reprise du dialogue avec
el-Assad permettrait de faire progresser la résolution du conflit
israélo-palestinien. Il tablait aussi sur un assouplissement des
sanctions pour amener l'homme fort de Syrie, éduqué à Londres et attaché
à sa réputation de dirigeant moderne, à la réforme. Une logique
anéantie par la révolte populaire et la réponse brutale qu'el-Assad lui a apportée. En
adoptant des sanctions, le président américain reconnaît qu'il s'est
trompé d'approche. Mais ces mesures auront un effet limité, vu le
caractère très circonscrit des relations entre l'Amérique et la Syrie.
Et il est douteux qu'Obama cherche à faire plus. Pressentant une
dégradation de la situation, le département d'État a ordonné aux
familles des personnels de l'ambassade de quitter le pays.