un texte clair sur la liberté comme on savait les écrire avant la grande contamination franc-maçonne, libérale:
L'Église condamne-t-elle toutes ces libertés que l'on considère comme le fondement de la société moderne1? Condamne-t-elle, en particulier, la liberté de penser et de parler, la liberté de conscience et de culte ? Avant de répondre à cette question, il est bon de s'entendre sur le sens qu'il faut attacher au mot liberté. D'après la doctrine de l'Église, la liberté c'est le pouvoir phy¬sique d'agir de toile ou de telle façon, mais ce n'est pas le droit d'agir de n'importe quelle façon. La raison prescrit à l'homme de croire ce qui est vrai et de faire ce qui est bien. La liberté ne peut donc pas être le droit de choisir entre le vrai et le faux, entre le bien et le mal, le juste et l'injuste. « La volonté, dit LEON XIII, par le seul fait qu'elle dépend de la raison, dès qu'elle désire un objet qui s'écarte de la droite raison, tombe dans un vice radical qui n'est que la corruption et l'abus de la liberté. Voilà pour¬quoi Dieu, la perfection infinie, qui, étant souverainement intelligent et la bonté par essence, est aussi souverainement libre, ne peut pourtant en aucune façon vouloir le mal moral... La faculté de pécher n'est pas une liberté, mais une servitude. » (Enc. Libertas).
Les libéraux, qui mettent en avant les libertés modernes, pour com¬battre ce qu'ils appellent l'intolérance de l'Église, entendent-ils par là que l'homme a le droit de penser, de dire, d'écrire, d'enseigner tout ce qu'il veut, le faux comme le vrai, le mal comme le bien, qu'il a une liberté de conscience illimitée, qu'il « lui est loisible de professer telle religion qui lui plaît ou même de n'en professer aucune », qu'il a le droit de s'affranchir de ses devoirs envers Dieu? Si telle est leur conception de la liberté, il est évident qu'elle est en opposition flagrante avec la doctrine catholique, disons plus, avec la raison. Cette soi-disant liberté, l'Église l'appelle « pure licence», et assurément, elle la condamne. Jamais elle n'admettra que la liberté puisse être le droit d'agir contre la raison et la nature, le droit d'embrasser l'erreur et de choisir le mal.
En principe, par conséquent, l'erreur et le mal n'ont aucun droit : ils n'ont droit ni à la tolérance ni même à l'existence. Saint AUGUSTIN a dit, il est vrai, qu'il faut « exterminer les erreurs et aimer les hommes». Et cela est juste, mais comment frapper les erreurs si l'on ne touche pas aux hommes qui les professent? En pratique donc, lorsque ces hommes sont de bonne foi, — et il n'est pas permis sans de graves motifs de supposer le contraire, — il convient de les traiter avec de grands ménagements et beaucoup de charité : ils ont droit à la tolérance. Mais il ne faut pas que cette tolérance puisse tourner au désavantage des autres membres de la société. Car, dans toute société, la liberté individuelle finit où commence le droit d'autrui. Aussi longtemps que la liberté de pensée et de conscience se confine au for intérieur, Dieu reste le juge de nos opinions. Mais si ello se traduit au dehors (discours ou écrits révolutionnaires), elle tombe alors sous l'appréciation du pouvoir social, et rien n'empêche celui-ci, plus que cela, il est de son devoir, de protéger la vérité contre l'erreur, le bien contre le mal, et de frapper ceux qui propagent les mauvaises doctrines, même s'ils sont de bonne foi. Combien son devoir devient plus impérieux s'il a affaire à des hommes de mauvaise foi !
abbé Boulanger