| | Existe-t-il un mal radical ? | |
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Invité Invité
| Sujet: Existe-t-il un mal radical ? 27/4/2010, 10:30 | |
| Existe-t-il un mal radical ?Lemonde.fr par Jean-François V., traducteur 16.04.10 Dans la philosophie ancienne, le mal n'existe pas : c’est un non-être, ouk on, ou, plus exactement une privation, steresis, d'être (Aristote).
Tant les religions dualistes de l'antiquité (mazdéisme, zoroastrisme, manichéisme) que la gnose admettent une existence provisoire du mal ou des ténèbres avant la victoire finale du Dieu suprême de lumière... Le christianisme orthodoxe ne fait pas exception ; son eschatologie exclut la persistance du mal : « Le dernier ennemi qui sera détruit, c'est la mort » dit saint Paul (1Cor15.26), « Il essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne sera plus, et il n'y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur" lit-on dans l'Apocalypse (Ap 21.4). Si le mal, en tant que tel, disparaît, ses conséquences, elles, sont éternelles : de la massa perditionis de saint Augustin au confutatis maledictis du Dies Irae en passant par l'étrange mélodie céleste dont parle saint Thomas d'Aquin, où les cris de souffrance des damnés se fondent aux louanges des justes dans une harmonie paradoxale, la théologie occidentale insiste sur le caractère infini des peines de l'enfer...Ce caractère infini découlant lui-même de ce que le péché mortel, le péché contre l'Esprit, est impardonnable (Mc 3.28, Matt 12.31, Lc 12.10).
Entendue ainsi, on pourrait parler d'une radicalité non pas du mal, mais de la faute. Il faut attendre l'époque moderne et Kant pour que l'expression apparaisse. Le penseur de Königsberg y consacre même un livre : « Über das radicale Böse in der menschlischen Natur». Mais ici « radicale » est à prendre au sens littéral de racine, radix : à la racine de l'obéissance à la loi morale se trouvent des impuretés d'intention, des motifs douteux. C'est Hannah Arendt, au XXe siècle, qui fera la synthèse de la théologie augustinienne et de la philosophie kantienne. Pour elle, le mal radical est bien une faute radicale : « difficult as it is to conceive of an absolute evil » écrit-elle dans « The origin of totalitarianism », « it seems closely connected with a system in which all men are equally superfluous ». Ce système aboutit à « a total collapse of all established moral standards in public and private life ».
Mais la faute réside-t-elle seulement dans la déshumanisation induite par le totalitarisme ? Qu'est-ce donc qui rend cette faute impardonnable ? Est-ce sa nature ? Ou ce contre quoi elle est commise ? Revenons à la théologie, c'est le blasphème qui rend le péché contre l'Esprit impardonnable, parce que l'Esprit est Dieu, c'est-à-dire la valeur suprême, l'Absolu. De même, la faute (hamartia, peccatus, crime) que constitue la Shoah est « radicale » parce qu'elle atteint la référence ultime de l'humanisme contemporain : l'humanité elle-même.
L'humanisme serait-il devenu une religion de l'humanité ? La réponse est oui : dans notre monde sécularisé, l'humanité, tient — par défaut — la place du Trancendant disparu ; il est donc logique que l'horreur du péché mortel soit transférée au crime contre l'humanité, au prix, il est vrai, d'un glissement de vocabulaire : le péché mortel — laïcisation oblige — devient mal radical. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Existe-t-il un mal radical ? 27/4/2010, 13:07 | |
| Existe-t-il un mal radical ?La réponse est évidente : - Citation :
- Il n'est hors de l'homme rien qui, entrant en lui, puisse le souiller; mais ce qui sort de l'homme, c'est ce qui le souille.
Car c'est du dedans, c'est du cœur des hommes, que sortent les mauvaises pensées, les adultères, les impudicités, les meurtres, |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Existe-t-il un mal radical ? 27/4/2010, 13:37 | |
| Le meurtre est la radicalité du mal ! De fait, c'est vrai que l'adultère conduit au meurtre, la jalousie, l'orguei. On peut être adultère, jaloux, orgueilleux sans commettre de meurtre. |
| | | fredsinam
Messages : 3914 Inscription : 30/11/2008
| Sujet: Re: Existe-t-il un mal radical ? 27/4/2010, 14:52 | |
| - nilamitp a écrit:
- Existe-t-il un mal radical ?
Lemonde.fr par Jean-François V., traducteur 16.04.10
Dans la philosophie ancienne, le mal n'existe pas : c’est un non-être, ouk on, ou, plus exactement une privation, steresis, d'être (Aristote).
Tant les religions dualistes de l'antiquité (mazdéisme, zoroastrisme, manichéisme) que la gnose admettent une existence provisoire du mal ou des ténèbres avant la victoire finale du Dieu suprême de lumière... Le christianisme orthodoxe ne fait pas exception ; son eschatologie exclut la persistance du mal : « Le dernier ennemi qui sera détruit, c'est la mort » dit saint Paul (1Cor15.26), « Il essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne sera plus, et il n'y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur" lit-on dans l'Apocalypse (Ap 21.4). Si le mal, en tant que tel, disparaît, ses conséquences, elles, sont éternelles : de la massa perditionis de saint Augustin au confutatis maledictis du Dies Irae en passant par l'étrange mélodie céleste dont parle saint Thomas d'Aquin, où les cris de souffrance des damnés se fondent aux louanges des justes dans une harmonie paradoxale, la théologie occidentale insiste sur le caractère infini des peines de l'enfer...Ce caractère infini découlant lui-même de ce que le péché mortel, le péché contre l'Esprit, est impardonnable (Mc 3.28, Matt 12.31, Lc 12.10).
Entendue ainsi, on pourrait parler d'une radicalité non pas du mal, mais de la faute. Il faut attendre l'époque moderne et Kant pour que l'expression apparaisse. Le penseur de Königsberg y consacre même un livre : « Über das radicale Böse in der menschlischen Natur». Mais ici « radicale » est à prendre au sens littéral de racine, radix : à la racine de l'obéissance à la loi morale se trouvent des impuretés d'intention, des motifs douteux. C'est Hannah Arendt, au XXe siècle, qui fera la synthèse de la théologie augustinienne et de la philosophie kantienne. Pour elle, le mal radical est bien une faute radicale : « difficult as it is to conceive of an absolute evil » écrit-elle dans « The origin of totalitarianism », « it seems closely connected with a system in which all men are equally superfluous ». Ce système aboutit à « a total collapse of all established moral standards in public and private life ».
Mais la faute réside-t-elle seulement dans la déshumanisation induite par le totalitarisme ? Qu'est-ce donc qui rend cette faute impardonnable ? Est-ce sa nature ? Ou ce contre quoi elle est commise ? Revenons à la théologie, c'est le blasphème qui rend le péché contre l'Esprit impardonnable, parce que l'Esprit est Dieu, c'est-à-dire la valeur suprême, l'Absolu. De même, la faute (hamartia, peccatus, crime) que constitue la Shoah est « radicale » parce qu'elle atteint la référence ultime de l'humanisme contemporain : l'humanité elle-même.
L'humanisme serait-il devenu une religion de l'humanité ? La réponse est oui : dans notre monde sécularisé, l'humanité, tient — par défaut — la place du Trancendant disparu ; il est donc logique que l'horreur du péché mortel soit transférée au crime contre l'humanité, au prix, il est vrai, d'un glissement de vocabulaire : le péché mortel — laïcisation oblige — devient mal radical. | |
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