Serait-il possible que ce sujet reste paisible et orienté spirituellement à la réflexion ? s'il dérape, il sera verrouillé.
c'est l'édito de "la Vie"https://www.lavie.fr/idees/editos/si-le-grain-ne-meurt-93136.php
Sinon, il y a ce sujet : https://docteurangelique.forumactif.com/t29041-la-repression-totalitaire-en-russie
Si le grain ne meurt
La mort d'Alexeï Navalny, le 16 février 2024, est un choc pour les démocraties et tous ceux qui luttent en faveur de la paix. Signe-t-elle la fin de tout espoir ? Plutôt la poursuite d'un mouvement de résistance, qui commande de croire qu'un tel martyre portera ses fruits.
Par Martin Feron
L'annonce de la mort d’Alexeï Navalny, en détention dans un camp de l’Arctique russe, vendredi 16 février, a tragiquement marqué la fin – que l’on pressentait, sans la croire inexorable – de l’engagement de celui qui dénonçait sans cesse la corruption d’un régime de plus en plus totalitaire.
Comme une provocation à la douleur de ce qui s’apparente à un meurtre commandité, le système Poutine ajoute la perversité de retenir le corps, refusant de le livrer à ses proches pour qu’ils puissent faire au moins leur deuil.
Un meurtre sans cadavre, crime parfaitement cynique d’un martyr dont on essaye d’effacer l’existence, le nom et la mémoire dans une population atone, ignorante ou résignée.
Face à un pouvoir qui s'affranchit de tout
Car c’est un autre courage, remarquable, ces derniers jours, que d’oser simplement déposer quelques œillets à sa mémoire, au risque de finir incarcéré avec, à la clé, une condamnation pour un motif inique. La quasi-unanimité des réactions dans le monde, désignant sans hésiter le responsable de ces trois années de calvaire dans des conditions de détention inhumaines et de cette mort, a eu pour vertu de rassurer, un peu, devant l’abîme de désespoir engendré par une telle violence. Mais que valent les mots face à un pouvoir qui s’affranchit de tout ? Que vaut ce sacrifice ?
Écoutons d’abord Alexeï Navalny. Celui qui affirmait avoir vécu comme un athée, avant un retour à la foi dans l’orthodoxie, puisait dans la Bible les réponses à ses questions et s’en servait même pour interpeller ses juges.
« Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils seront rassasiés, déclarait-il pendant son procès.
J’ai toujours pensé que ce commandement particulier était plus ou moins une instruction d’activité. Ainsi, même si je n’apprécie pas vraiment l’endroit où je me trouve, je ne regrette pas d’être revenu ni ce que je fais. Tout va bien, parce que j’ai fait ce qu’il fallait. Au contraire, j’éprouve une réelle satisfaction. Parce que, à un moment difficile, j’ai fait ce qui était demandé par les instructions et je n’ai pas trahi le commandement. »« Je vous interdis d'abandonner »
Il donnait alors une clé de compréhension à cette décision, difficilement audible, de retourner, en janvier 2021, sur le sol russe, sachant à quoi il s’exposait. Par ces mots d’une radicalité évangélique, il rejoignait celles et ceux qui, à travers le monde et l’histoire, se sont élevés au nom de leur foi face aux injustices, trop souvent au prix de leur vie. Parfaitement conscient, il avait même laissé un « testament » à l’adresse de ceux qui le pleurent aujourd’hui.
« Je vous interdis d’abandonner. S’ils décident de me tuer, cela signifie que nous sommes extrêmement puissants. Nous devons faire usage de ce pouvoir. (…)
La seule chose nécessaire pour que le mal triomphe est la passivité des personnes justes. Donc ne restez pas passifs. » Ainsi le martyre de Navalny n’est-il pas un échec, mais la semence d’un mouvement,
au sujet duquel l’espérance nous commande de croire qu’il l’emportera un jour sur les ténèbres. Déjà, son épouse, Ioulia Navalnaïa, déclarait dans une vidéo cette semaine :
« Je vous appelle tous à vous tenir près de moi. (…)
Ce n’est pas une honte de faire peu, c’est une honte de ne rien faire, c’est une honte de se laisser effrayer. » Puissions-nous ne plus avoir peur et dépasser la désespérance qu’engendre une telle nouvelle.