24-07-2014 - 10:40 AFP
Comme Noël, l'été peut être long pour les personnes âgées isolées
Quand on a la radio pour seule compagnie, l'été peut sembler long. Comme de nombreuses personnes âgées, Georgette, 88 ans, ne peut plus sortir seule de son petit appartement parisien, et attend avec impatience les rares visiteurs qui viennent rompre son isolement.
Cette petite dame frêle, aux yeux maquillés d'un bleu clair assorti à sa tenue, a posé du jus de pomme et un gâteau sur la table de la cuisine, pour accueillir une bénévole des Petits frères des Pauvres.
"Avoir quelqu'un à qui parler, à qui confier certaines choses, ça passe l'après-midi", souligne Georgette, qui habite depuis 1954 son immeuble du sud de Paris, mais ne connaît pas ses voisins.
Elle ne peut pas non plus compter sur des visites de sa famille, qui habite en Auvergne. "Je n'ai plus qu'un frère. Et des tas de neveux, mais je ne sais pas s'ils savent que j'existe". Son mari est décédé il y a trente ans.
Tant qu'elle a pu s'occuper, elle n'a pas souffert de la solitude. "J'ai fait de la peinture, de la mosaïque, de la gymnastique, du yoga, de la natation. Et l'après-midi j'allais au club de la mairie".
Mais une chute, il y a quatre ans lors d'un séjour à Cannes, a brusquement modifié le quotidien de cet ancien agent d'entretien. Aujourd'hui, elle marche avec des cannes, doit attendre son aide ménagère pour aller faire ses courses et passe des heures à faire des mots croisés.
"La radio me tient compagnie. Et je suis bien contente quand on me téléphone, même si c'est une réclame", dit-elle. "Se sentir inutile, c'est ça qui me pèse le plus. Même le ménage, je n'arrive pas à le faire comme il faut".
Selon une enquête de la Fondation de France, les plus de 75 ans sont particulièrement touchés par la montée des solitudes: une personne âgée sur quatre est en situation d'isolement relationnel.
- Formation au numérique -
Le phénomène touche en particulier les grandes villes: 33% des personnes âgées résidant dans une ville de plus de 100.000 habitants sont isolées, contre 21% dans les communes rurales.
"La solitude et l'isolement sont le quotidien de toute l'année", souligne à l'AFPTV Raymond Penhard, responsable parisien des Petits frères des Pauvres. "Mais pendant la période estivale, ce sentiment s'aggrave: nos villes se vident, notamment au mois d'août, les commerçants ferment leur rideau, les médecins ne sont plus aussi disponibles...".
Comme les fêtes de Noël, l'été peut être une période difficile à passer quand on est seul, et qu'on entend beaucoup parler de vacances à la télévision et à la radio.
Pour pallier l'absence de certains de ses bénévoles, l'association fait appel pendant l'été à d'autres bonnes volontés, qui peuvent venir d'associations partenaires à l'étranger. Comme Anca Zavadescu, la visiteuse roumaine de Georgette, qui habite Bucarest.
"J'avais une grande famille, des grands-parents qui ont vécu jusqu'à 90 ans, mes parents jusqu'à 80 ans", dit cette sexagénaire, économiste à la retraite, dont le mari est décédé prématurément. "J'ai compris que la vieillesse est un cadeau, et qu'il faut soigner ce cadeau".
Rompre la solitude des personnes âgées est également une mission des jeunes en service civique.
Paul Dervieux, 25 ans, volontaire auprès de la Mairie de Paris, participe à l'initiative Port'âge, qui consiste à apporter des livres aux personnes ne pouvant pas se déplacer jusqu'à la bibliothèque. "On reste environ une heure, une heure et demi à bavarder. Je suis souvent la seule et unique personne à qui elles parlent de toute la journée", dit-il.
Pour lutter contre la solitude, l'association Old'Up organise pour sa part des ateliers de formation au numérique. "Il ne s'agit pas forcément de savoir utiliser l'ordinateur, mais l'ensemble des outils qui nous entourent", explique Marie-Françoise Fuchs, 82 ans, cofondatrice et présidente.
Savoir lire et envoyer un SMS, manier la télécommande de la télévision, utiliser les bornes RATP et SNCF ... Tout ce qui peut aider à garder sa liberté d'aller et venir, et à ne pas se couper de la société.