J'inclus une pensée d'un saint moine cistercien de chez nous, qui a publié plusieurs livres traitant du cheminement de l'intériorité chrétienne. J'ai cru qu'elle pourrait nourrir notre réflexion sur la Miséricorde.
Yves Girard, o.c.s.o.
Titre du livre: CROIRE JUSQU'A L'IVRESSE!
Disponibilité: Éditions Pauline
DIMANCHE DES RAMAUX
''Ils amenèrent l'âne à Jésus '' ( Luc 19,35)
Aurions-nous tendance à formuler des réserves si on nous annonçait que notre personne est l'unique raison d'être de l'éternelle célébration?
En d'autres termes, sommes-nous parvenus à l'heure d'une royauté qui converge vers le dedans?
Est-ce qu'aujourd'hui notre visage émerge seul, unique et irremplaçable au milieu de cette multitude immense qui est là devant Dieu.?
Sommes-nous aimés de façon exclusive et élective?
Occupons-nous présentement la première place dans le cœur du Père?
La couronne que nous a préparée l'Amour ne tient pas sur une tête d'ouvrier, mais sur celle de l'enfant qui sait pleurer.
Notre seul titre de gloire, c'est d'être des pécheurs pardonnés.
Nous n'avons pas è attendre de récompense puisque nous sommes nous-mêmes la récompense du Père.
Nous avions rêvés de pouvoir nous présenter au dernier jour les bras chargés de fruits, en oubliant que notre personne était l'unique froment capable de remplir les greniers du Père.
L'amour est un feu qui consume tout ce qui, en nous, n'est pas l'enfant bien-aimé.
Nous éprouvons un mal immense à '' dématérialiser'' le langage qu'utilise l'Écriture quand elle s'efforce de nous décrire la Cité bienheureuse et les lois qui la régissent.
Nous reproduisons l'erreur de L'Israël ancien qui a pris à la lettre l'annonce d'un Messie vainqueur sur le mode humain.
Les talents reçus et dont nous aurons à rendre compte ne sont pas ceux que nous nous évertuons à faire fructifier.
L'unique monnaie d'échange est notre capacité d'ouverture à une miséricorde que nous n'aurons pas méritée.
L'unique tribut que nous aurons à offrir à l'amour sera l'abime de perdition que nous portons dans notre fonds caché.
Un seul jugement qui nous attend, celui du baiser offert aux indignes que nous sommes.
La porte unique qui donne accès à la maison du Père, est l'acceptation du cœur de Dieu tel Qu'il nous a été révélé.
Notre cœur est lent à accepter le rituel d'une autre gloire, celle de la charité
Au dernier jour, si nous n'y prenons garde, nous choisirons d'entrer au paradis par une porte différente que celle qu'ont emprunté le Larron, le Publicain, et la brebis perdue.
Ceux-là nous répètent que nos fautes ne sont pas ce qui nous ferme l'entrée de la demeure, comme c'est la loi chez les humains.
Pas plus d'ailleurs que ce sont nos mérites et nos vertus qui nous vaudront d'avoir part à la lumière.
C'est la pure acceptation de l'indulgence imméritée qui n'a d'autre aspiration que d'envelopper notre misère.
Quelle inconvenance que de penser à négocier à la porte de ce royaume!
Ce n'est pas par l'étude, ce n'est pas non plus par l'exemple des autres que nous parviendrons à vivre comme les bénéficiaires de la liberté nouvelle , mais par l'onction d'une paix inconnue qui ne peut prendre racine en nous avant que notre état de perdition ne nous soit révélée, ce qui nous amènera à ne plus compter que sur un miracle de salut en faveur de notre cause désespérée.
Quand l'expérience de l'infinie douceur qui respire au cœur du Christ nous aura touchés au cœur, elle fera disparaître nos actions les meilleures au profit de l'indéfinissable beauté de l'Amour capable d'embrasser notre visage de disgrâce avec un élan plus généreux que s'il s'agissait du plus admirable des anges,
Quelle sera notre surprise le jour ou nous apprendrons que nous n'avions pas à remplir les greniers du Père, mais que, tout au contraire, notre mission consistait à les vider de tout leur contenu afin d'y être seuls à y régner !
Notre péché avait percé le cœur du Christ en croix.
C'était là la première étape de la rédemption.
Son couronnement aura lieu quand l'audace de notre confiance en arrivera à ouvrir les veines du Père pour les vider de leur contenu de Miséricorde.
C'est la lance du soldat qui a fait jaillir le sang et l'eau.
Ce sont nos larmes de repentir qui obligeront le cœur du Père
à se déverser tout entier en nous.
Nous ne pouvons régner qu'en pleurs et à genoux!
C'est la béatitude des larmes qui nous attend au seuil de l'éternité.