Et pourtant :Occident et islam
Père Boulad : égyptien, prêtre, islamologue
Vidéo :
http://www.radio-canada.ca/audio-video/pop.shtml#urlMedia%3D/Medianet/
2008/CBFT/SecondRegard200811161330_1.asx
" Dans 100 ans l'occident est musulman."" L'islam radical est négateur d'un certain nombre de valeurs humaines
: le rôle de la femme, les droits de la femme, les droits de l'homme,
la liberté religieuse, la liberté d'expression, la liberté de croire ou
ne pas croire ... tout cela sera balayé, et ça je le refuse ! "
L’Islam tel qu’il est véritablement.
Par le R.P. Henri BOULADPublié en Suisse en 1997 dans la revue « Choisir »
Il y a quelques années, le grand juriste égyptien Saïd el-Achmaoui
publiait son fameux livre Al Islam as-syâssi, traduit en français sous
le titre: « L’islamisme contre l’islam ». Dans cet ouvrage, Achmaoui
cherchait à montrer que l’islamisme est une déviation, une perversion
du véritable islam, dont l’orientation est uniquement spirituelle et
religieuse.
Je prendrai ici le contre-pied de la position d’Achmaoui en affirmant
que l’islamisme, c’est l’islam!
Cette affirmation n’a rien d’arbitraire ou de fantaisiste. Elle ne
relève pas d’un parti-pris ou d’une provocation, ni d’une prise de
position fanatique ou intolérante, ni d’une approche volontairement
négative ou réductrice.
Je pense au contraire que cette affirmation est parfaitement cohérente
avec l’histoire et la géographie, avec le Coran et la sunna, avec la
vie de Mohammed et l’évolution de l’islam, avec ce que l’islam dit de
lui-même. Je refuse la position de ceux – musulmans ou chrétiens – qui
se voilent la face, jouent à la politique de l’autruche, tournent
autour du pot, refusent de voir la réalité en toute objectivité, ou
prennent leurs désirs pour des réalités, au nom du dialogue et de la
tolérance…
On dira que le problème de l’islam est plus complexe, que ma position
est simpliste, simplificatrice et tend à l’amalgame. Je suis tout à
fait conscient de la variété des islams. J’ai même une conférence de
deux heures sur « Les six islams », où je déploie l’éventail des
différents islams, depuis l’islam ouvert libéral, modéré et laïcisant,
jusqu’à l’islam le plus radical, en passant par le soufisme, l’islam
des confréries et l’islam populaire.
Je suis parfaitement au courant de toute la tendance actuelle de
l’islam laïc et laïcisant, moderne et modernisant. Je pense malgré tout
que ce courant n’est guère représentatif de l’islam officiel, de
l’islam orthodoxe et classique, de l’islam sunnite tel qu’il s’est
toujours manifesté, tel qu’il s’est toujours voulu, tel qu’il se veut
encore aujourd’hui. D’où le rejet par l’islam officiel de tous les
penseurs et intellectuels qui, cherchant à réinterpréter l’islam à la
lumière de la modernité, se font taxer d’hérétiques, d’apostats ou de
déviationnistes.
L’islamisme n’est ni une caricature, ni une contrefaçon ni une hérésie
ni un phénomène marginal et aberrant par rapport à l’islam classique
orthodoxe sunnite. Je pense au contraire que
l’islamisme, c’est l’islam
à découvert, l’islam sans masque et sans fard, l’islam parfaitement
conséquent et fidèle à lui-même, un islam qui a le courage et la
lucidité d’aller jusqu’au bout de lui-même, jusqu’à ses dernières
implications.
L’islamisme, c’est l’islam dans toute sa logique, dans toute sa
rigueur. L’islamisme est présent dans l’islam comme le poussin dans
l’œuf, comme le fruit dans la fleur, comme l’arbre dans la graine.
Mais qu’est-ce que l’islamisme? L’islamisme, c’est l’islam politique,
porteur d’un projet et d’un modèle de société visant à l’établissement
d’un état théocratique basé sur la sharia, seule loi légitime – parce
que divine – telle que révélée et consignée dans le Coran et la Sunna,
une loi qui a réponse à tout.
Il s’agit là d’un projet global et globalisant, total, totalisant,
totalitaire. Car l’islam est un tout: une foi et un culte, un horizon
et une morale, un mode de vie et une vision du monde. Intransigeant, il
offre le salut ou la perdition. L’islam est la vérité qui ne supporte
pas le doute et ses adeptes forment « la meilleure des communautés ».
L’islam se veut à la fois religion, état et société – din wa dawla.
Et c’est ainsi qu’il a été depuis ses plus lointaines origines.
Le passage de La Mecque à Médine, qui marque le début de l’ère
musulmane, l’Hégire, signifie que l’islam cesse d’être une simple
religion pour devenir Etat et société. L’Hégire est le moment où
Mohammed cesse d’être simple chef religieux pour devenir chef d’état et
leader politique. Religion et politique seront désormais
indissolublement liées.
« L’islam est politique ou n’est rien! », (Khomeiny). La « soumission »
à Dieu, qui est le sens même du mot « islam » est aussi bien exigée du
croyant que de l’Etat. Le pouvoir politique se voue donc entièrement à
une mission religieuse. C’est l’annexion de la politique par la
religion.
Ce qui frappe dans l’islam, c’est son extraordinaire cohésion. Car dans
l’islam se mêlent indistinctement, inextricablement, le sacré et le
profane, le spirituel et le temporel, le religieux et le civil, le
public et le privé. L’islam couvre et embrasse tous les aspects de la
vie et de la société. C’est en ce sens que je disais plus haut que
l’islam est global et globalisant, total, totalisant, totalitaire.
L’idée d’un islam laïc est en soi une hérésie. Il contredit l’essence
même de l’islam.
L’islam est un creuset fusionnel intense qui engendre un tissu social
fortement structuré et donne à une société consistance, cohésion et
continuité. D’où son extraordinaire capacité d’intégration. L’islam a
toujours été intégrateur, jamais intégré; toujours assimilateur, jamais
assimilé…
Simplicité de son dogme, de sa morale, de ses principes. Sa souplesse,
son élasticité, sa capacité quasi infinie d’adaptation, à partir d’un
noyau dur, solide, irréductible. C’est cette souplesse de l’islam qui
explique en partie sa foudroyante expansion tant en Afrique qu’en Asie.
Ce continent, dans lequel le christianisme a pénétré six siècles avant
l’islam, ne compte que 3% de chrétiens, alors qu’on évalue à près de
30% le nombre de musulmans.
Un dernier point: le djihâd. Le djihâd n’est pas un aspect marginal, un
accessoire de l’islam. Il constitue une des obligations du croyant. On
a voulu interpréter ce terme de façon réductrice, comme si le djihâd
n’était qu’un combat spirituel et intérieur, un combat contre les
passions et les instincts.
Non, les textes sont clairs: il s’agit bel et bien d’un combat par
l’épée et ce n’est pas un hasard si l’Arabie saoudite et tel ou tel
groupe islamiste représentent un glaive sur leur écusson. (voir Coran:
2.216 – 217; 3.157 -158; 3.169; 8.17; 8.39; 8.41; 8.67; 8.69; 9.5;
9.29; 9.41; 9.111; 9.123; 47.35; 59.. Il y a, dans l’islam, l’idée de
force, de puissance.
L’islam est la religion de la force. Il
s’impose
souvent par la force et ne cède en général qu’à la force. C’est un
fait: historiquement l’islam s’est étendu par la contrainte et la
violence. Il n’est que de consulter les ouvrages de Bat Yeor pour s’en
convaincre. D’ailleurs, l’silam ne divise-t-il pas le monde en deux: la
demeure de l’islam et celle de la guerre – dar-al- Islaâm wa dar
al-harb?
L’islam a pour ambition et pour prétention de convertir l’humanité
entière… Pour le musulman, il n’y a qu’une seule vraie religion:
l’islam: inna-dîn ‘ind-Allah al-Islâm.
Le musulman a en lui la certitude d’avoir raison, de posséder la
vérité. Cette conviction a pour conséquence la
froide détermination
d’aboutir, de réussir un jour à conquérir le monde envers et contre
tout. Rien ne l’arrêtera. Car l’islam compte avec le temps. Il a le
temps, il a tout le temps, il a toute l’éternité. Il y a dans l’islam
la patience infinie du bédouin suivant sa caravane. Ça prendra le temps
que ça prendra, mais on y arrivera!