Ratisbonne. La vérité est bien différente
Avant tout, il convient de préciser que les faits dont il est question, en vertu du droit allemand, sont tombés en prescription depuis des décennies et que parmi les 49 responsables, les principaux sont morts depuis longtemps. Bref, nous parlons de faits qui ne pourront jamais être vérifiés dans un procès et dont certains responsables n'auront jamais leur mot à dire et ne pourront jamais se défendre pour des raisons évidentes.Précisons ensuite que l'enquête porte sur ds violences qui ont eu lieu à l'école Vorschule Etterzhausen, du temps où le directeur était Johan Meier, président de 1953 à 1992 et mort il y a 25 ans. En 2010 , un certain Alexander Probst parla publiquement pour la première fois des violences subies entre 1960 et 1970 par cet homme mort depuis longtemps, et sur la base de sa plainte, le diocèse de Ratisbonne, à l'époque dirigé par Mgr Müller, ouvrit l'enquête, dont les résultats définitifs ont été exposés ces derniers jours.
Il en ressort l'image d'une institution typique de «dans le temps», où étaient encore en vigueur les châtiments corporels, qui en Allemagne n'ont été interdits par la loi qu'en 1980. Les 547 sont ceux qui, entendus par la commission, ont affirmé en avoir subi. Beaucoup de ces histoires heutent certes la sensibilité contemporaine, mais ils correspondent en grande partie à des méthodes éducatives notoirement utilisées presque partout jusqu'à il y a quelques décennies.
Il y a ensuite les 67 qui ont été victimes d'agression de caractère sexuel de la part de 9 personnes, dont les deux principaux accusés étaient déjà morts au moment de l'ouverture de l'enquête et n'ont donc pas pu raconter leur version.
Sans nier la gravité de ces épisodes, nous nous permettons de dire que l'affaire semble avoir une portée somme toute beaucoup plus limitée que celle que les titres des journaux télévisés et des quotidiens cherchent clairement à nous faire croire.
Le fait est qu'il y a un mot qui apparaît à un moment donné, à point nommé pour rendre l'ensemble plus juteux: Joseph Ratzinger. Eh oui ... L'école en cause était en effet l'une de celles où étudiaient les membres du Regensburger Domspatzen, célèbre chœur de voix blanches que dirigeait à l'époque Georg Ratzinger, frère du pape émérite. Ce dernier n'a jamais été effleuré par l'accusation d'abus sexuels. D'après les témoignages qu'on peut lire dans le rapport final, il ressort que certains élèves se souviennent de lui avec des appréciations positive et parfois avec affection et d'autres en évoquent surtout le caractère bourru qui le conduisait parfois à lâcher une gifle. Il y a aussi des passages qui font franchement sourire, comme l'anecdote dans laquelle, tandis que le professeur crie, furieux, son dentier tombe ... Pour les corrections, qui encore une fois sont typiques des méthodes pédagogiques de «dans le temps» le vieux prêtre a présenté des excuses il y a sept ans, juste après les premières plaintes. En résumé, il s'agit vraiment de pas grand'chose.
Cependant, il semble vraiment qu'on ait voulu de force associer le nom Ratzinger aux affaires d'abus sexuels. Et ainsi l'avocat Ülrich Weber, chargé par le diocèse de Ratisbonne de mener l'enquête, lors de la conférence de presse des jours derniers, a accusé le prêtre, aujourd'hui âgé de 93 ans, d'«avoir fermé les yeux et de ne pas avoir pris de mesures à cet égard» . En fait, à lire le rapport, les informations à ce sujet semblent très confuses. George Ratzinger aurait reçu des informations à trois reprises, très éloignées dans le temps, en 1969, en 1979 et 1993. On ne comprend pas bien de quoi il a effectivement entendu parler. Dans le rapport, il est question génériquement de «violence», sans préciser leur nature. L'avocat Weber affirme que le prêtre ne comprit pas qu'il s'agissait d'abus sexuels et pensa probablement à un simple excès dans les méthodes correctives, chose que l'intéressé avait déjà déclaré en 2010. À la page 380, on affirme qu'il «n'était pas le contact préféré pour signaler les violences sexuelles, compte tenu de son caractère» et à la page 381, est rapportée l'affirmation d'un ex-choriste qui qualifie d'«impensable» de tenir des discours sur le sexe avec lui, décrit comme un vrai puritain. Avouons-le: d'après ce que nous avons en main, à charge contre Georg Ratzinger, il n'y a strictement rien.
Mais voilà: mardi soir (18 juillet), le nom de «Ratzinger» a été prononcé à côté des mots «abus» et «sexuels» et tous les journaux télévisés ont pu hurler le titre: «Abus sexuels: le frère de Joseph Ratzinger savait!». De sorte que tout l'Occident est allé au lit horrifié à cause des 547 enfants violentés par le frère de Ratzinger. Avec en plus le non-dit, qui était pourtant le seul et unique motif pour lequel la nouvelle avait été donnée: l'Émérite pouvait-il ne pas savoir?
Le tout, comme par hasard, par retour de courrier à la nécrologie que Benoît XVI a dédiée au défunt cardinal Meisner, qui a créé des troubles nerveux chez qui-vous-savez... et tant qu'on y était, l'avocat Weber s'est senti en devoir d'attaquer aussi le cardinal Müller, autrement dit celui qui a décidé l'ouverture de l'enquête. Il faisait probablement semblant...
Du reste, immédiatement après qu'on lui eût joué de la guitare, ces dernières semaines, certains ont marmonné que la raison de sa mise à pied était qu'«il n'avait pas fait assez contre les prêtres pédophiles». Personne n'avait été capable de préciser la chose. Aujourd'hui, on comprend peut-être mieux.
Par ailleurs, on sait que quand on veut se faire un prêtre, l'accusation de pédophilie est l'atout gagnant ...
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