D'abord, en ce qui concerne les changements substantiels, comme censément la mort ou la nutrition, objectivement je ne vois pas de critère pour les détecter. D'un point de vue empirique et empiriste, je ne vois en quel sens on pourrait parler de changement substantiel...
Je ne vois aucun critère pour distinguer un changement accidentel d'un changement substantiel. Est-ce par l'opération propre de chaque être? Mais il faudrait d'abord s'entendre sur les limites d'un être. Et sur la façon de détecter une opération propre.
Certains thomistes partagent d'ailleurs ce point de vue et ils ont essayé de prouver autrement l'hylémorphisme.
Parmi les scolastiques, Denys le Chartreux a émis des doutes sur le fait que la mort est un changement substantiel.
En ce qui concerne les autres arguments, ils sont insuffisants dans la mesure où l'interprétation thomiste n'est pas exclusive. Selon l'interprétation thomiste, une dualité d'aspects dans un corps ne signifie pas que le corps contiendrait en fait deux substances élémentaires, l'une purement active ou purement passive, l'une purement une, l'autre purement plurielle, etc... Les thomistes parlent plutôt de «principes», «d'éléments». Et pour montrer que ces principes ne sont pas au même niveau que les corps mêmes, ils les appellent «principes quo». (Quo = ce par quoi, sous-entendu: ce par quoi un corps est ce qu'il est).
Mais le concept de «principe quo» est une abstraction métaphysique que certains pourraient refuser. Dans l'ontologie bouddhistes, les trois dernières «preuves» de l'hylémorphismes seraient interprétées dans un autre sens. Pour certains bouddhistes, ça voudrait dire que l'unité des corps n'est pas réelle. C'est une unité illusoire. Les bouddhistes du Madhyamaka pourraient alors clamer que ça confirme leur thèse du caractère construit de toute chose. Les bouddhistes Yogacara, quant à eux, pourraient dire que c'est la preuve qu'il est absurde de parler de substance matérielle extérieure à l'esprit (Les Yogacarins sont idéalistes). Certains védantins, à l'intérieur de l'hindouisme, pourraient quant à eux y voir une confirmation de leur thèse que le monde phénoménal n'est pas la réalité ultime, et que la perception de ce monde peut être dépassée.
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