Certains parmi nos détracteurs avancent que Dieu le Père a fait tuer son Fils pour que l'homme échappe à un jugement dont le Père est lui-même seul responsable suggérant par là que le Dieu des chrétiens serait un Dieu sanguinaire, cruel et détestable. Ils en viennent à attribuer ce qui est dû à l’amour et à la miséricorde de la Sainte Trinité à un vice absolument abject! Ils suggèrent également que Dieu n’a pas besoin d’un sacrifice pour accorder son pardon et qu’il n’y a rien qui demande ou exige d'être radicalement racheter.
En réalité, ce n'est pas le Père qui est responsable du jugement, c'est l'homme lui-même qui consciemment à choisi de s'éloigner de Dieu et par conséquent de s'éloigner de l'amour et en s'éloignant de l'amour est tombé dans toutes sortes de désordres. Les désordres que nous voyons dans le monde sont avant tout l'expression du désordre intérieur des hommes. Ce désordre est le résultat d'une volonté humaine de s'émanciper des lois divines qui sont faites non pour la perte de l'homme mais pour son bien, c'est-à-dire pour favoriser son union harmonieuse avec le Créateur et la création. En l'occurence, Jésus lui-même a pu déclaré: "Le Père est en moi" et "Je suis dans le Père" (Jean 10;trente-huit) et encore "Celui qui me voit voit celui qui m'a envoyé" (Jean 12;45) ? En accusant le Père, on accuse également le Fils, et vice-versa.
Comment peut-on ne serait-ce qu'insinuer que le Père aurait agit par cruauté à l'égard de son Fils alors qu'une communion d'amour infini les unis ? Ils accusent Dieu le Père d'être un Dieu sanguinaire et pervers alors qu'en réalité c'est dans un mouvement d'amour éternel qu'Il est venu dans son Fils afin de donner sa propre vie pour que le monde renaisse et revive. Car la vie du Fils c'est la vie du Père et la vie du Père c'est la vie du Fils et c'est précisémment par le don qu'Il a fait au monde de Sa propre vie que nous vivons aujourd'hui. Par ailleurs, Dieu le Père n'a pas expulser son Fils du paradis, c'est le Fils lui-même, en union avec le Père et l'Esprit-Saint, dans un même mouvement d'amour, qui a décidé de naître en ce monde afin de rendre à l'homme la beauté glorieuse qu'il tenait du Créateur.
En outre, prétendre qu'il n'y a rien à pardonner revient à dire que rien de ce que font les hommes sur terre ne peut offenser Dieu et revient finalement à nier la réalité du mal. En vérité, le mal est si profond en l'homme que soit Dieu doit détruire l'homme soit Il doit le libérer de ce mal. S'il voulait nous détruire, croyez-moi, ce serait déjà fait! Mais non seulement Dieu ne veut pas détruire l'homme pécheur, mais il veut le sauver, c'est pour cette unique raison qu'Il est venu à notre rencontre, qu'Il s'est rendu visible et vulnérable, pour nous dire regardez, vous qui êtes mauvais, non seulement je vous donne de bonnes choses mais en plus je vous donne jusqu'à ma propre vie, ma propre personne, mon propre sang.
Car si le Fils a souffert dans sa chair pour le salut du monde, le Père a souffert dans Son coeur et la passion du Fils n'a suscité aucune réjouissance dans le coeur du Père. On dit souvent que le Père s'est détourné du Fils au moment de la Passion car le Fils portait à ce moment précis le péché du monde. C'est possible, mais je crois surtout que le Père a éprouvé une telle tristesse qu'il ne pu dire le moindre mot à l'instant même ou les hommes, dans leurs folies, ont crucifié le signe de Son amour. En vérité, le Père n'est ni insensible ni impassible, tout comme le Fils n'est ni insensible ni impassible, tout comme le Saint-Esprit n'est ni impassible ni insensible. L'incarnation même du Fils est le signe concret de la sollicitude infinie du Père!
La croix est à la fois le signe de la profondeur du mal qui habite le coeur de l'homme et la réponse même de Dieu à ce mal: l'amour! Seriez-vous prêt à donner votre vie pour ceux que vous aimez ? Et bien, c'est ce que Dieu a fait, nous étions à l'agonie et nous faisions nauffrage, et il a fait le geste qui sauve. Devant une telle manifestation d'amour, je ne peux que me prosterner devant mon Créateur pour lui exprimer toute ma reconnaissance. Nous méritions le châtiment et il nous a communiqué sa grâce, nous méritions de périr, et il est mort à notre place.
Certains hommes, durant leur vivant, font la démarche de s'inscrire comme donateurs d'organes afin qu'après leur décès d'autres hommes gravement malade puisse prolonger leurs jours sur cette terre. C'est un don gratuit et totalement désintéressé pour des hommes qu'ils ne connaissent absolument pas. Je trouve personnellement cela très admirable. Mais combien plus admirable le don de Dieu qui en offrant sa propre vie à un monde malade et souffrant, non pas pour que les hommes prolongent leur vie de quelques années sur terre, mais pour qu'ils vivent avec lui pour toujours et dès maintenant. Car le don d'un homme, fut-il remarquable, est limité tandis que le don de Dieu est sans limite dans l'espace et dans le temps et il est l'expression de l'immensité de Son amour pour tous les hommes qu'Il aime et connaît personnellement.
Pour reprendre la comparaison avec le donateur d'organe, sans la mort du donateur le malade est condamné. La vie du malade est donc liée à la mort du donateur. Certains disent que la bonté du donateur est suffisante mais semblent occulter que c'est dans le don que se manifeste cette bonté! Ainsi, pour que l'homme vive éternellement, Dieu a traverser la mort et Il en a triomphé afin de nous ouvrir la voie. Je pourrais encore évoquer l'exemple du testament, c'est-à-dire de l'acte par lequel un homme dispose pour après son décès de tout ou partie de ses biens en faveur d'un ou plusieurs tiers. Sans le décès du testateur, il n'y a pas d'héritier. Ce n'est pas pour rien que la Bible chrétienne s'appelle le "Nouveau testament". Sans la mort du Christ, le Nouveau testament n'aurait que peu de valeur spirituelle et nous n'aurions pas part à "l'héritage des saints". Cet héritage n'est d'ailleurs pas réservé à une poignée de privilégiés car tous les hommes sont appelés au salut bien que beaucoup ne répondent pas à cet appel. Certes, nous sommes en présence d'un grand mystère et je peux comprendre que cela peut heurter la sensibilité de plusieurs, mais c'est pourtant la foi des chrétiens depuis les origines et nous ne percevons pas dans la passion du Christ l'expression d'un Dieu pervers, cruel ou sanguinaire mais une oeuvre unique d'amour et de rédemption opérée par la Sainte Trinité en faveur de tous les hommes.
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"Jésus-Christ est un Dieu dont on s'approche sans orgueil et sous lequel on s'abaisse sans désespoir" (Blaise Pascal)