Est-ce qu'il n'y aurait pas, en fin de compte, un petit problème à dire cela ?
Le Père est doux et humble de coeur. Nous le savons parce que Jésus a dit de Lui-même qu'Il était doux et humble de coeur, et que "qui m'a vu a vu le Père".
Donc, dire que la souffrance rend humble revient à dire que de la souffrance procède un bien. Du mal surgit un bien.
Donc le mal a un sens : il va vers le bien.
Donc le mal n'est pas le mal, mais, en quelque sorte, un bien en devenir.
Est-ce qu'on ne saute pas une étape, dans le raisonnement ? Faire du surgissement du bien une conséquence automatique et nécessaire du mal, c'est au final nier l'existence même du mal. Si le mal travaille au salut de tous, il n'est plus le mal, mais le bien. Puisque le salut est le Bien suprême.
N'y a-t-il pas lieu de voir un processus de transformation similaire à celui des sacrements ? Une matière, le mal. Une forme, l'offrande spirituelle. Et un fruit : le salut.
On conserve au mal son caractère de mal, et à la souffrance son non-sens fondamental. Le bien du mal ne peut plus devenir prétexte à l'inaction. Le mal devient au contraire prétexte à l'action, puisque si transformation en bien il doit y avoir, ce n'est que par la rencontre de l'offrande humaine et de la puissance divine. Offrande de sa souffrance propre, offrande de son service auprès des souffrants.
Remède au fatalisme. Rejet de la théologie des amis de Job. Le mal ne peut devenir un bien que si la Vie qui jaillit du sein du Père l'irrigue. Et pour que cette irrigation puisse être, il faut, nécessairement, un agir humain.
Du mal, Dieu fait certes surgir un bien. Mais pas tout seul. Du mal, serait-il peut-être plus exact de dire, Dieu et l'homme font surgir un bien.
En résumé, ce n'est que par grâce que la souffrance rend humble. Et non par elle-même. Par elle-même, elle ne fait qu'endurcir le coeur. Elle rend méchant. Les exemples, d'ailleurs, abondent.
Elle peut rendre humble si on ne lui concède pas la victoire. Les exemples, aussi, abondent. Signe, donc, que l'Esprit souffle où Il veut, et que c'est tel un ouragan qu'Il fut envoyé dans le monde...
Qu'en pensez-vous ?