Chrétiens ? Oui, mais...
2015-03-24 L’Osservatore Romano
Tant de personnes se disent chrétiennes mais n’acceptent pas « le style » avec lequel Dieu veut les sauver ? Ce sont les chrétiens que le Pape François a appelés « chrétiens oui, mais... », incapables de comprendre que le salut passe par la croix. Et Jésus sur la croix – a expliqué le Souverain Pontife dans son homélie de la Messe célébrée à Sainte-Marthe mardi 24 mars – est précisément « le noyau du message de la liturgie d’aujourd’hui » (cf. Jn 8, 21-30).
Le peuple de Dieu esclave en Egypte – a expliqué le Pape – avait été libéré. Le « chemin de libération » commença ainsi dans la joie. Les israélites « étaient contents » parce qu’ils étaient « libérés de l’esclavage », contents parce qu’ils « portaient en eux la promesse d’une très bonne terre ».
Mais à un certain moment, a poursuivi le Pape, au moment où « s’allongeait le chemin », le peuple ne supporta plus le voyage et « se fatigua ». C’est pourquoi il commença à parler « contre Dieu et contre Moïse : pourquoi nous avoir fait sortir d’Egypte pour nous faire mourir dans ce désert ? ».
Dans leur mécontentement, « ils se défoulaient, mais ne se rendaient pas compte que par ce comportement, ils empoisonnaient leur âme ». Voici ensuite la venue des serpents, parce qu’ « ainsi, comme le venin des serpents, à ce moment là, ce peuple avait l’âme empoisonnée ».
Jésus aussi parle de ce même comportement. En se référant à un passage des Evangiles de Matthieu (11, 17) et de Luc (7, 32), le Souverain Pontife a dit : « Jésus, lorsqu’il parle de ce comportement, dit : "Mais qui peut vous comprendre, vous? Vous êtes comme ces gamins assis sur une place: Nous vous avons joué de la flûte, et vous n'avez pas dansé ! Nous avons entonné un chant funèbre, et vous n'avez pas pleuré ! N’y a-t-il rien qui vous satisfasse?" ». C’est-à-dire que le problème « n’était pas le salut, la libération », parce que « tous le voulaient » ; le problème était « le style de Dieu : la musique de Dieu pour danser ne plaisait pas ; les chants funèbres de Dieu pour pleurer ne plaisaient pas ». Alors, «que voulaient-ils » ? Ils voulaient, a expliqué le Pape, agir « selon leur pensée, choisir leur propre voie de salut ». Mais cette route « ne mène nulle part ».
C’est un comportement que nous rencontrons encore aujourd’hui. Même « parmi les chrétiens », s’est interrogé François, combien sont « un peu empoisonnés » par ce mécontentement ? Nous entendons dire : « Oui, vraiment, Dieu est bon, mais chrétiens oui, mais... ». Ce sont ceux, a-t-il expliqué, « qui n’ouvrent par en grand leur cœur au salut de Dieu » et « demandent toujours des conditions » ; ceux qui disent « oui, oui, oui, je veux être sauvé, mais par cette route-là ». C’est ainsi que « le cœur est empoisonné ».
François a souligné : « Ne pas accepter le don de Dieu avec son style, là est le péché ; là est le venin ; cela nous empoisonne l’âme, ôte la joie, ne laisse pas avancer ».
Et « comment le Seigneur résout-il cela ? Par le même venin, par le même péché » : c’est-à-dire « il prend sur lui le venin, le péché et est relevé ». Ainsi guérit-il « cette tiédeur de l’âme, cette façon d’être chrétiens à moitié », ce fait d’être « chrétiens oui, mais... ». La guérison, a expliqué le Pape, ne vient qu’en « regardant la croix », en regardant Dieu qui assume nos péchés.
Voici dès lors son invitation adressée aux fidèles : « Regardons le serpent, le venin dans le corps du Christ, le venin de tous les péchés du monde et demandons la grâce d’accepter les moments difficiles ; d’accepter le style divin du salut ; d’accepter également cette nourriture si légère dont se plaignaient les Juifs » : la grâce, en d’autres termes, « d’accepter les voies par lesquelles le Seigneur me fait avancer ». François a conclu en souhaitant que la semaine sainte « nous aide à sortir de cette tentation de devenir "chrétiens oui, mais..." ».