L'accompagnement des personnes en fin de vie

Pour ceux qui ne le savent pas encore, j'accompagne depuis peu des personnes en fin de vie. L'une d'entre elles a particulièrement attiré mon attention et je souhaite vous faire partager et témoigner de certaines choses.

Cette personne souffre de "démence sénile", vous pourrez aisément trouver des réponses sur cette pathologie en farfouillant sur le net. Elle a des "hallucinations" puissantes et vraiment, très déstabilisantes pour la personne qui l'accompagne. Je vous fais partager deux courts extraits de mes deux dernières études de situations pour que vous sachiez un peu plus de quoi il est question :

"Elle a des pertes de mémoire, des absences, des hallucinations très fortes, hier, alors que j’allais lui donner son repas, elle se croyait attaquée par des gangsters tout droit sorti du poste de télévision qu’elle prenait pour une fenêtre. Elle trouvait que ma façon de taper à répétition ma cuillère à soupe dans l’assiette était une façon efficace d’appeler « police secours ». "

"il lui arrive d’avoir des hallucinations, de voir des souris qui dansent dans sa chambre, ou alors des éléphants d’Asie qui la traverse chevauché par des indous, ou encore de croire être dans un « bordel » ou un « repaire mafieux ». Il me semble à la vu du diagnostique et de mes observations, qu’elle est en « perte totale de repaires concrets »."

Souvent, elle me demande "emmenez moi, emmenez moi je veux partir d'ici". Elle voudrait partir dans une autre maison de retraite qu'elle idéalise pour une raison que j'ignore. Elle me parle aussi très souvent de monsieur "C" qui a beaucoup compté pour elle et que est mort il y a quelques années.

Venons en au cœur du sujet.


Il y a quelque temps elle m'a dis que monsieur "C" était venu la voir et qu'il allait l’emmener dans cette super maison de retraite où tout le monde est jeune et en bonne santé.

Hier soir elle m'a dis que monsieur C et son mari étaient venu lui rendre visite et elle me dit que le personnel soignant lui avait fait une mauvaise blague en lui disait qu'ils étaient morts.

Il lui arrive très souvent d'appeler sa mère "mamanmamanmaman", lorsque je lui ai posé la question : "Pourquoi appelez vous votre maman?" elle me répondit tout de go :"Hé pour qu'elle vienne pardi !" Alors qu'elle l'a perdu à l'age de 16 ans et qu'elle en à 86.

Une autre dame tout à fait lucide elle, me dit que son mari qui est mort depuis 30 ans lui rend visite toute les nuits mais qu'il ne lui parle pas.

Personnellement je ne puis m’empêcher d'interpréter et vous ?

Bonjour Marc
Je visite aussi pas mal les personnes en fin de vie et en maison de retraite et ces réflexions sur la venue de leur mari est courante. Elles rêvent aussi toujours du passé mélangé au présent. Certaines ont leur mari qui leur donne la main la nuit.
Tu interprètes cela comment Marc ?

Je crois que c'est une préparation à la mort, a ce qui se passera ensuite.

Marc. a écrit:

Je crois que c'est une préparation à la mort, a ce qui se passera ensuite.

Je pense aussi, mais ce n'est pas toujours pour tout de suite. J'ai une dame qui parle de son mari comme s'il venait la voir toutes les nuits et cela depuis plus de 10 ans !

Oui, cela peut prendre du temps mais cela s'intensifie avec l'age.

On peut aussi lire ces phrases de personne atteintes de la maladie d’Alzheimer sur cet excellent site : http://papidoc.chic-cm.fr/04alzheimsuggGD.html

Merci Marc, je vais lire.
Pourtant, ce ne sont pas toujours celles qui sont atteintes de cette maladie qui parlent de leurs défunts.
Merci en tout cas d'avoir abordé ce sujet.

Oui Espérance, a la fin de mon sujet, il est question d'une dame tout à fait lucide et autonome qui est visitée par son mari.

Bonne lecture ;) Je n'ai pas trouvé de meilleur site.

La dame dont vous parlez Marc ne distingue plus ce qui est imaginaire de ce qui est "réel" et ne distingue plus le passé du présent mais ses affects sont bien réels.
Vous pouvez à mon avis l'aider à résoudre ses affects problématiques.
Sans chercher à démentir ses visions oniriques mais sans les confirmer non plus, vous pouvez échanger avec elle sur le côté purement affectif.
Il faut beaucoup de tact pour ne pas être intrusif et indiscret.
Dans ses peurs par exemple vous pouvez retrouver les vôtres pour être en empathie.

Vous pourriez lui faire la proposition suivante lorsqu'elle a une hallucination effrayante : et si vous décidiez de n'avoir plus peur de rien Madame? Essayez et regardez comment vous vous sentez.
Ca lui fera surtout du bien si vous faites vous même ce que vous lui demandez de faire, pas forcément sur la même peur.
Toute peur est au fond la peur de la mort mais on la dérive sur autre chose de moins effrayant.

Marc. a écrit:

Je crois que c'est une préparation à la mort, a ce qui se passera ensuite.

Et je pense que, à un moment, les morts viennent vraiment.

@ Renaud, l'affaire est bien plus difficile que vous ne le croyez. Il n'est pas question d'un cas isolé mais d'une généralité. Je n'ai pas asses d'expérience pour donner un chiffre approximatif mais je sais que beaucoup de personnes âgées vivent ce genre d'évènement.

Après, relativiser ce que vit la personne alors que moi même je ne sait pas ce qu'elle vit n'en ayant pas fait l'expérience n'est pas vraiment le meilleur positionnement.

Renaud a écrit:

Vous pourriez lui faire la proposition suivante lorsqu'elle a une hallucination effrayante : et si vous décidiez de n'avoir plus peur de rien Madame? Essayez et regardez comment vous vous sentez.

L'idée, dans l'accompagnement des personnes est de ne pas leur dire ce qu'elles devraient faire. Ce sont des personnes qui ont beaucoup plus d'expérience que nous. Ce qu'il faut faire, c'est à dire le bon positionnement, serait de lui dire : "Rassurez vous, je suis avec vous, je ne vous quitte pas, ne vous abandonne pas. Vous pouvez me parler, je vous écoute."

Accompagner, ce n'est pas guider sur un chemin qui nous est inconnu. De plus -et ça c'est ce qui est le plus difficile- c'est de savoir que pour ces personnes il n'est plus question d'apprendre mais de maintenir les acquis, leurs yeux sont tournés vers le passé et plus vers l'avenir. On ne leur dit pas "comment allez vous ?" Mais avez vous passé une bonne nuit/journée? Avez vous bien dormi? Bien mangé ? etc... Beaucoup de choses qui appartiennent à notre vie courante ne font pas sens chez elles. Pour accompagner il faut vraiment se décentrer. Le centre : c'est l'autre.