Gorbatchev dénonce un retour en arrière en Russie 20 ans après le putsch L'ex-président soviétique Mikhaïl Gorbatchev lors d'une conférence de presse le 17 août 2011 à Moscou
© AFP Alexander Nemenov
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MOSCOU (AFP) -
(AFP) - Le dernier dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev s'est dit
mercredi "mécontent" de l'évolution de la Russie 20 ans après le putsch
manqué contre sa perestroïka jugeant que le pays retournait en arrière
en ce qui concerne la démocratie.
Monopole du parti
au pouvoir, élections truquées et "tendances" autoritaires: "il y a un
retour en arrière", a déclaré le père de la perestroïka et prix Nobel de
la paix au cours d'une conférence de presse, résumant la situation
politique en Russie, 20 ans après le coup d'Etat contre lui.
Le 19 août 1991,
des putschistes soutenus par le chef du KGB, Vladimir Krioutchkov, et le
ministre de la Défense, Dmitri Iazov, assurent que le président
Gorbatchev, en vacances en Crimée, est "incapable d'assumer ses
fonctions pour des raisons de santé". Ils proclament l'état d'urgence,
rétablissent la censure et font entrer les chars à Moscou.
Le coup a échoué
trois jours plus tard, mais ces événements ont scellé le sort de l'Union
soviétique qui sera finalement dissoute en décembre 1991.
Très critiqué pour
son rôle jugé parfois ambigu dans ces événements, M. Gorbatchev, 80
ans, s'est défendu en affirmant mercredi que sa présumée "faiblesse"
avait permis d'éviter un bain de sang.
"L'essentiel était
d'éviter un bain de sang. Cela aurait pu déboucher sur une guerre
civile dans un pays regorgeant d'armes y compris nucléaires", a-t-il
estimé. Mais 20 ans après, l'ancien président dit qu'il n'est pas
"content" de l'évolution de son pays et dresse un tableau sombre de ce
qu'est devenue la Russie.
"Pour la
mortalité, nous sommes en bas de la liste, à côté des pays africains, il
y a 96% de pauvres si l'on utilise les critères appliqués dans un pays
comme l'Autriche, et il y a deux fois moins de gens qui reçoivent des
diplômes d'enseignement supérieur qu'après la Deuxième Guerre mondiale",
a-t-il énuméré.
Une photo d'archives de Mikhaïl Gorbatchev à Moscou datée du 21 août 1991
© AFP/Archives Stephane Bentura
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M. Gorbatchev a également
déclaré qu'il "soutenait" l'ex-président et puissant Premier ministre
Vladimir Poutine malgré quelques "tendances autoritaires" mais il a
critiqué son parti, Russie unie, estimant qu'il ressemblait à ce
qu'était le Parti communiste à l'époque soviétique.
"Il faut renoncer au monopole, il ne faut pas répéter l'URSS dans sa pire variante", a-t-il souligné.
"Il ne faut pas
nous raconter des histoires, inventer des structures inutiles, tous ces
fronts", a-t-il poursuivi faisant allusion au Front populaire, une large
coalition autour de Russie unie de Vladimir Poutine.
"Je soutiens Poutine, mais (le Front), ça ne va pas", a-t-il dit.
Mikhaïl Gorbatchev
a également estimé que le milliardaire Mikhaïl Prokhorov, qui a
récemment pris la tête d'un parti de droite, s'était lancé en politique
"sur ordre du gouvernement".
"S'il manque de voix (aux élections législatives de décembre), ils vont lui remonter son résultat", a-t-il prédit.
"Il nous faut des
élections honnêtes. Aujourd'hui, c'est (Vladislav) Sourkov (chef adjoint
du Kremlin, considéré comme le principal idéologue du régime, ndlr) qui
dit aux régions quel pourcentage elles doivent fournir" en terme de
résultat aux élections, a ajouté M. Gorbatchev, laissant clairement
entendre que les scrutins en Russie sont truqués.
Ni Vladimir Poutine ni le président Dmitri Medvedev n'ont annoncé leurs intentions en vue du scrutin présidentiel de 2012.
Vladimir Poutine,
président de 2000 à 2008, avait désigné Dmitri Medvedev comme dauphin,
faute de pouvoir se représenter pour un troisième mandat consécutif. Il
peut désormais revenir au Kremlin.