XCLUSIF AFP: Hugo Chavez veut s'ériger en "président à vie" du Venezuela Le président vénézuélien Hugo Chavez, le 29 juillet 2011 à Caracas
© Presidencia/AFP
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CARACAS (AFP) -
(AFP) - L'ex-ministre de la Défense vénézuélien Raul Isaias Baduel,
emprisonné depuis 2010 pour corruption, estime que son ancien compagnon
d'armes, le président Hugo Chavez, veut s'ériger en "président à vie
d'un pays en ruines".
Ce général à la
retraite a été condamné en 2010 à près de huit ans de prison pour
détournement de fonds et abus de pouvoir lorsqu'il était ministre de la
Défense (2006-2007). Il se dit victime depuis son départ du gouvernement
de persécutions politiques de la part de M. Chavez.
Pourtant, les deux
hommes ont été très proches et leur rencontre date de près de 40 ans,
lorsqu'ils avaient convenu à l'Académie militaire d'"oeuvrer ensemble à
l'établissement d'une démocratie meilleure".
"En 1982, j'ai
juré avec Chavez d'oeuvrer sans répit pour une véritable démocratie,
mais il a décidé d'oublier ce serment et entretient le projet de
s'ériger en président à vie d'un pays en ruines", a déclaré M. Baduel
dans un entretien accordé à l'AFP dans sa cellule de Ramo Verde, dans
les environs de Caracas.
Le président vénézuélien Hugo Chavez (G) et Raul Isaias Baduel, à l'époque ministre de la Défense, s'essuient le front lors d'une parade militaire, le 10 janvier 2007 à Caracas
© AFP/Archives Pedro Rey
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Le général Baduel a accompagné
Chavez au gouvernement dès son arrivée au pouvoir en 1999. En avril
2002, il avait même dirigé l'opération ayant permis de rétablir le chef
de l'Etat dans ses fonctions après une tentative de putsch.
Mais les rapports entre les deux hommes se sont détériorés jusqu'à la rupture en 2007.
"En avril 2002,
j'ai rempli mon devoir et suis resté fidèle à la constitution. Je ne
suis pas un héros. En 2007, j'ai de nouveau ressenti le besoin
d'exprimer que les choses prenaient une mauvaise tournure", explique le
militaire, entouré de photos de Nelson Mandela de son équipe de
base-ball favorite, et d'images religieuses.
En 2007, M.
Baduel, alors ministre de la Défense, avait fait campagne contre le
projet de nouvelle Constitution d'inspiration socialiste, défendu par le
président vénézuélien et finalement rejeté par référendum.
Après son départ du gouvernement, il a été accusé puis condamné en mai 2010 à sept ans et 11 mois de prison.
Le président vénézuélien Hugo Chavez (G) et Raul Isaias Baduel, à l'époque ministre de la Défense, le 11 août 2006 à Caracas
© AFP/Archives Juan Barreto
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"Aucune procédure n'a été
respectée dans mon jugement, l'objet du délit n'a jamais été présenté et
ils n'ont pas pu se mettre d'accord sur le montant que je suis censé
avoir détourné. J'aurais pu fuir, mais j'ai décidé de rester car j'ai la
conviction d'être innocent", explique l'intéressé.
"On m'accuse
d'être un traître. Traître à quoi? A qui? A un homme? Je préfère cela
plutôt que de trahir des millions de personnes", poursuit-il, pesant
chacun de ses mots et refusant l'invective.
"Aujourd'hui je
pense que celui que je connaissait m'a menti. Je pense que Chavez a
toujours eu un programme occulte", déplore cet homme de 56 ans.
Pour Baduel, le
gouvernement actuel est une "dictature déguisée" assortie d'un "culte de
la personnalité" exagéré du président, qui selon lui s'évertue à rendre
ses compatriotes dépendants de l'Etat.
"Il faut se
mobiliser de manière civique et démocratique car il y a tant de
frustration accumulée que le Venezuela est assimilable aujourd'hui à une
cocote-minute sans valve d'évacuation", assure-t-il.
Toutefois, Baduel
reconnaît que les difficultés du pays ne disparaîtront pas avec le
départ de Chavez car, selon lui, les minorités que représentent les
chavistes et l'opposition ont pris en otage le pays.
A un an d'une
nouvelle élection présidentielle, Baduel n'écarte pas la possibilité de
bénéficier d'une grâce. Selon lui, Hugo Chavez, candidat à un troisième
mandat, pourrait y voir un bénéfice politique potentiel.
Enfin, au sujet
des problèmes de santé de son ancien frère d'armes, opéré d'une tumeur
cancéreuse il y a un mois, le général considère que cela lui a rappelé
sa condition d'être humain.
"Il a été soumis à la puissance de Dieu, et Dieu lui a rappelé ce que représente la vie", a-t-il conclu.