Nord du Mexique: les policiers désertent, par peur des cartels de la drogue Un membre de la police ilitaire mexicaine sur la scène d'un meurtre à Ciudad Juarez le 24 mars 2010 © AFP/Getty Images/Archives Spencer Platt |
MONTERREY (Mexique) (AFP) - Des dizaines de localités du nord du
Mexique se retrouvent sans policiers, abandonnées par des
fonctionnaires effrayés par les menaces des cartels de la drogue, qui
ont déjà tué plus de 60 d'entre eux depuis le début de 2010, selon les
autorités locales.
Les policiers locaux paient un lourd tribut à
la guerre entre les cartels qui se disputent le contrôle du trafic, en
particulier dans le nord du pays frontalier des Etats-Unis, premiers
clients de la cocaïne au monde.
Les règlements de comptes entre
trafiquants ajoutés aux affrontements avec les forces de l'ordre ont
fait 23.000 morts dans l'ensemble du Mexique depuis décembre 2006, à
l'arrivée au pouvoir du président Felipe Calderon, qui a érigé la lutte
contre les cartels en priorité nationale.
Avec 251 victimes en
2009, l'Etat de Nuevo Leon, dont la ville de Monterrey est la capitale
administrative, est certes nettement moins meurtrier que la seule ville
de Ciudad Juarez, qui a comptabilisé plus de 2.600 morts.
Mais
61 de ces 251 morts étaient des policiers, a expliqué jeudi à l'AFP le
responsable régional de la Sécurité publique, Luis Carlos Trevino, et
l'exemple d'une dizaine de localités du Nuevo Leon donne une idée de la
situation dans le reste du nord du pays.
Cinq policiers, deux
femmes et trois hommes, ont encore été enlevés et assassinés voici une
semaine à Monterrey, première ville industrielle du pays.
Herreras,
un gros bourg de 1.800 habitants à une centaine de kilomètres de
Monterrey, "comptait jusqu'il y a deux semaines trois policiers, mais
depuis qu'ils ont reçu des menaces ils ne sont pas revenus travailler
et je ne crois pas qu'ils reviendront", a expliqué M. Trevino.
Des policiers embarquent le corps du chef de la police de Agualeguas, retrouvé décapité, le 26 mars 2010 près de Monterrey © AFP/Archives Dario Leon |
Une dizaine de localités sont dans le même cas ou presque.
"A
Los Aldama, par exemple, ils n'ont plus de policiers depuis le 7 avril,
quand on a assassiné le directeur de la police de la ville voisine,
General Trevino, et deux de ses hommes", a poursuivi M. Trevino.
La
région connaît un pic de violence depuis quelques semaines, en raison
d'une recrudescence des affrontements entre le cartel dit du Golfe et
ses anciens hommes de main, les "Zetas", devenus ses rivaux, selon M.
Trevino.
A Agualeguas, toujours dans les environs de Monterrey,
"on a retrouvé décapité le 26 mars le directeur de la police, dans le
coffre de sa voiture de patrouille", a-t-il encore indiqué.
Par
manque d'effectifs, les autorités ont mis en place un plan de
qualification de volontaires, pour en faire des policiers, a-t-il
souligné, mais "le problème, c'est que personne ne veut être policier,
de crainte d'être assassiné".
Le maire de Herreras, Juan Antonio
Gutierrez, est pragmatique, et résigné : "nous sommes mieux sans
policiers", a-t-il affirmé à l'AFP.
"Bien sûr, nous avons peur,
mais étant donné qu'ils tuent les policiers, qui vont-ils tuer s'il n'y
en a pas ? Peut-être resteront-ils entre eux et nous laisseront-ils en
paix", s'est-il expliqué.