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 monachisme orient et occident quel avenir?

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franco

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monachisme orient et occident quel avenir? Empty
MessageSujet: monachisme orient et occident quel avenir?   monachisme orient et occident quel avenir? EmptyMar 25 Mai - 7:18

voici un texte qui pourrait nous éclairer jattend vos réponses à ce poste .
merci franco


Le titre de cette communication est très ambitieux. En réalité je ne l’ai pas choisi ; on me l’a donné. Si j’étais prophète, je pourrais peut-être vous dire ce que sera l’avenir de la vie religieuse et du monachisme. Mais je ne suis pas prophète. Je ne puis donc pas vous dire ce que sera l’avenir. Je puis cependant exprimer certains désirs et certaines attentes. Je puis aussi essayer de réfléchir avec vous sur la situation présente de nos communautés, en la voyant dans le contexte plus général de l’Église universelle aujourd’hui et de l’histoire de la vie consacrée à travers les âges. Cela peut nous amener à prévoir dans une certaine mesure ce qui pourra se passer dans les années et les décennies à venir, mais surtout à nous situer face à un certain nombre de situations et de défis.



On dit souvent que l’avenir de chacune de nos communautés comme de nos Ordres ou Congrégations est entre les mains de Dieu. Cela est vrai. Mais cet avenir est aussi entre nos mains. Il sera nécessairement influencé par les décisions que nous prendrons ou ne prendrons pas.



1. le lien à la culture



La vie religieuse ici en Belgique comme, à des degrés différents, dans presque tous les pays de l’Europe comme aussi des Amériques, est dans une situation de crise. Il serait ridicule de se le nier. Mais cette crise (qui n’est pas nécessairement quelque chose de négatif) est liée à une crise de l’Église dans son ensemble – aussi bien de l’Église universelle que de celle de nos pays – et à une crise de société – qui affecte tout particulièrement l’Europe qui essaye de naître. Essayer de résoudre cette crise de la vie religieuse sans tenir compte de la crise plus générale serait s’orienter dans une voie sans issue. C’est pourquoi il est urgent que toutes les personnes concernées – évêques, supérieurs religieux, autorités civiles ainsi que penseurs et théologiens s’engagent dans une réflexion commune, une analyse de la situation et une recherche de voies nouvelles. Des recherches parallèles ne sont guère utiles.



Lorsqu’on étudie l’évolution de la vie consacrée à travers les âges, depuis les toutes premières générations chrétiennes, on se rend rapidement compte qu’elle a toujours été étroitement liée à la culture, au sens le plus général et le plus profond du mot, et donc toujours affectée par les changements culturels. Les nouvelles formes de vie religieuse sont toujours nées à des moments d’importants changements sociaux et culturels. Chaque fois qu’une fondation d’une importance particulière a été faite ou une grande réforme s’est produite dans l’histoire de la vie religieuse ou monastique, ce fut lorsqu’un petit groupe d’hommes ou de femmes ont été particulièrement sensibles à la culture de leurs contemporains et ont donné dans leur propre vie aux défis et aux questions de leur temps une réponse qui valait non seulement pour eux mais aussi pour tous les autres. C’est d’ailleurs pourquoi beaucoup adoptèrent leurs réponses et se joignirent à eux.



Cette longue histoire de la vie religieuse remonte non seulement jusqu’aux premières générations chrétiennes mais jusqu’au Christ. Il est bien connu que les premières formes de vie consacrée, avant le grand mouvement de diversification du deuxième millénaire, furent les diverses traditions monastiques dont on place en général les premières grandes fondations à la fin du troisième siècle ou au début du quatrième. Mais en réalité avant le grand essor du monachisme du quatrième siècle, il y eut dans toutes les Églises locales des premiers siècles un grand mouvement spirituel et ascétique qui remonte au Christ lui-même. Il y avait en effet à l’époque du Christ, dans toute l’Asie et le Moyen-Orient un grand mouvement ascétique à l’intérieur comme à l’extérieur du judaïsme. Jean-Baptiste, qu’il ait appartenu ou non à ce mouvement, se situait dans ce courant. Lorsque Jésus descend dans les eaux du Jourdain pour se faire baptiser, il assume tout ce mouvement et lui donne une signification nouvelle. Lorsque certains chrétiens des premières générations voulurent adopter comme mode permanent de vie les appels radicaux du Christ adressés à ses disciples, ils trouvèrent dans cette tradition ascétique déjà presque millénaire un mode d’expression. De sorte qu’on peut dire que la vie religieuse, dans sa première expression, est le résultat d’un processus d’inculturation – la première et la plus réussie de toutes les formes d’inculturation – la rencontre du message évangélique avec une tradition enracinée dans l’âme humaine et dans la culture du temps.



2. la suite de l’histoire



L’idée que la vie religieuse serait contre-culturelle est un mythe des années ‘68. Chaque fois que la vie religieuse a été particulièrement vivante elle a été profondément enracinée dans la culture de son temps. Lorsqu’à la fin du troisième siècle le monachisme égyptien connaît une explosion numérique, ce fut rendu possible par les réformes politiques de Septime Sévère qui avait permis l’établissement de diocèses dans les nouvelles métropoles le long du Nil jusqu’en Haute Égypte, et à la réforme agraire de Dioclétien qui rendait possible pour la première fois l’apparition de grandes communautés cénobitiques. Au sixième siècle, en Occident, c’est dans le contexte de la Réforme gélasienne rendue possible par le génie politique d’un roi barbare à demi civilisé – Théodoric, roi des Ostrogoths, qu’apparaît saint Benoît qui, à travers sa Règle et ceux qui l’adopteront aura une telle influence sur les générations suivantes, qu’il fut nommé le Père de l’Europe. C’est dans le contexte d’un grand mouvement populaire de retour à l’idéal de simplicité et de communion de l’Église primitive que naissent un grand nombre de fondations monastiques, dont Cîteaux sera la plus belle expression, avant que l’idéal en soit repris le siècle suivant sous une forme différente par les Ordres mendiants.



Il y a eu, malheureusement, à la même époque un divorce entre la spiritualité et la science et ce divorce a eu des conséquences très lourdes aussi bien sur la vie chrétienne, en particulier celle des religieux que sur le monde de la science. La science s’est réfugiée dans les écoles et la spiritualité dans les monastères, et elles ont poursuivi par la suite des chemins parallèles pour le plus grand dam des deux.

Les formes de la vie religieuse que nous connaissons aujourd’hui sont nées ou se sont développées pour la plupart dans la longue période de l’histoire de l’Église et de la société occidentale qu’on appelle la « Chrétienté ». Cette période est terminée. Elle a eu ses grandeurs et ses limites intrinsèques ; mais qu’on s’en réjouisse ou qu’on le déplore, elle est bel et bien terminée ; et tous les efforts pour rétablir une nouvelle situation de « Chrétienté » dans ce sens sont pathétiques et vouées à l’échec.



À la même époque où apparaissaient les grandes réformes monastiques du XIIème siècle puis les Ordres mendiants, commençait, avec l’apparition de l’approche scientifique des problèmes ce qu’on appellera plus tard la modernité. Un mouvement que, malheureusement l’Église a boudé. C’est durant cette période de modernité particulièrement au cours des deux ou trois derniers siècles que sont apparues plusieurs formes plus récentes de vie religieuse et les grandes restaurations monastiques du 19ème siècle, avec, en particulier Dom Guéranger en France et les frères Wolter en Allemagne, à Beuron et Maria Laach. Malgré tous leurs aspects positifs, ces fondations et ces restaurations s’inscrivaient dans un mouvement qui allait à contre-courant du développement de la société et de la culture.



Puis le génie pastoral de Jean XXIII nous donna Vatican II qui permit à l’Église, au moins en principe, de se voir, de se vouloir et de se dire envoyée au monde et existant pour être un ferment d’Évangile dans le monde.



Si vous me permettez une note personnelle : J’appartiens à la génération de ceux qui ont attendu le Concile avec beaucoup d’espoir, l’ont suivi intensément et se sont impliqués de tout leur être à le mettre en pratique. J’étais jeune moine lors de l’annonce du Concile par Jean XXIII et j’ai reçu cette annonce comme une bouffée d’air frais. J’étais à Rome sur la Place Saint-Pierre lors de l’ouverture du Concile et j’ai passé toutes les années du Concile à Rome comme étudiant, en suivant avec intensité tous les événements. Après le Concile, étant très tôt impliqué dans les organismes centraux de notre Ordre, j’ai investi toute mon énergie à travailler au renouveau demandé par le Concile. Je dois dire qu’au cours des dernières années c’est avec une certaine tristesse que je vois un bon nombre des rêves engendrés par le Concile s’évanouir ou être mis de côtés par des membres influents des dicastères romains.



3. Nos pauvretés actuelles



Ce n’est certes pas le lieu et le temps d’analyser ce qu’ont vécu nos communautés et ce qu’a vécu l’Église depuis lors. Il serait tout à fait erroné d’attribuer au Concile ou aux réformes provoquées par lui l’affaiblissement en nombre de la plupart de nos communautés et la fermeture de beaucoup de nos institutions. Ce que le Concile avait demandé et ce à quoi nous nous sommes attelés était un renouveau spirituel ; mais ce renouveau spirituel ne pouvait se faire sans un bon nombre de réformes structurelles qui, pour la plupart arrivaient trop tard. De plus, la krisis (au sens étymologique et positive) que ces transformations provoquèrent eut comme conséquence une grande purification.



Nous avons fait l’expérience de Job. Nous nous rendons compte que, privés d’un grand nombre de choses dans lesquelles nous trouvions notre identité et dont nous étions fiers, nous existons toujours. (Nous refaisons un peu l’histoire de Job). Nos communautés et nos congrégations, pour la plupart ne sont plus fortes, puissantes et influentes comme au temps de la Chrétienté, mais elles continuent, dans leur précarité et leur faiblesse d’être des témoins de la sequela Christi. Car c’est là notre vocation : ne rien préférer à l’amour du Christ, et suivre le Christ, dans une société qui est elle-même en profonde transformation et sans cesse à la recherche de son identité – et du Christ, sans le savoir explicitement. Ce témoignage de l’Évangile nos communautés peuvent toujours le donner, que nous soyons de petites ou de grandes communautés. Évidemment lorsque nous cédions à la tentation de voir notre identité dans les grands services que nous rendions à l’Église et à la société, plus nous étions mieux c’était. Mais si notre identité réside dans ce que nous sommes spirituellement, dans notre marche à la suite du Christ, que nous soyons cinq ou cinquante ou cent ne change rien à la valeur spirituelle de notre communauté.



L’une des pauvretés que nous vivons, est que nous n’avons même pas une théologie renouvelée de la vie religieuse. Dans toute la réflexion théologique contemporaine il n’y a pas eu un renouveau de la théologie de la vie religieuse. – Mais y a-t-il eu un véritable renouveau de la théologie du mariage ? ou du sacerdoce ? ou du ministère épiscopal ? Y a-t-il eu, en Europe, depuis le Concile un véritable renouveau de la théologie tout court ? Peut-être attend-on encore une libération de la théologie (attention à l’ordre des mots).



Il est même difficile de trouver un nom qui ne fasse pas problème pour désigner notre forme de vie chrétienne. On parlait autrefois de « vie religieuse » ; mais la vie de tout le monde doit avoir une dimension religieuse. On parlait d’états de perfection ; mais tout le monde est appelé à la perfection. Perfectae caritatis a bien mis l’accent sur l’élément essentiel qui est la sequela Christi. Évidemment tout le monde doit suivre le Christ, comme tout le monde est appelé à la perfection de la charité. Ce qu’on a appelé jusqu’à maintenant la « vie religieuse » -- y compris la vie monastique – n’est qu’une façon particulière de vivre la vie chrétienne. Il s’agit de décrire pour chacun de nous en quoi consiste cette particularité plutôt que d’essayer de trouver un dénominateur commun de caractère théologique. On préfère parler de nos jours de « vie consacrée ». L’expression n’est pas plus satisfaisante que les autres. Toute personne chrétienne est consacrée à Dieu par son baptême ; et même tout être humain est consacré à Dieu par le fait d’être créé à l’image de Dieu et d’être appelé à être transformé à l’image du Fils de Dieu. L’instruction post-synodale sur la vie religieuse a conservé comme titre Vita consecrata. Dans une première rédaction les trois principaux rédacteurs avaient tout d’abord pensé structurer toute la théologie de la vie religieuse autour du thème de la « beauté ». Le titre proposé était « Divinae pulchritudinis amatores » (évidemment sous l’influence d’Urs von Balthasar). Heureusement plusieurs des lecteurs firent remarquer que cette vision théologique n’avait de support ni dans les textes conciliaires ni dans les interventions faites durant le Synode. Cette « vision » théologique ne fut pas retenue (mais la mention de la beauté se retrouve plus d’une vingtaine de fois dans le texte). Le texte de cette Constitution contient des richesses, mais ne fait évidemment pas progresser la théologie de la vie religieuse. Mais est-ce nécessaire ?



Il est peut-être faux de vouloir élaborer une « théologie de la vie consacrée » distincte de la théologie de la vie chrétienne en général. La vie consacrée n’est autre chose qu’une façon de vivre la vie chrétienne. Si nous arrivons à être d’authentiques chrétiens et chrétiennes, c’est déjà beaucoup.



Je suis convaincu que si l’on veut trouver dans les textes conciliaires des éléments pouvant servir de base pour une théologie de la vie consacrée, il faut les chercher dans Lumen gentium, la grande Constitutions sur l’Église dans le monde d’aujourd’hui beaucoup plus que dans Perfectae caritatis ; tout comme c’est dans Lumen Gentium et non pas dans le document conciliaire sur la liturgie, qu’on peut trouver les fondements d’une théologie de la liturgie.





4. L’évolution du religieux



Et dans ce contexte je voudrais signaler quelques aspects de l’évolution de la société qui affectent l’Église et qui affecteront sans doute l’avenir de la vie religieuse.

L’un de ces aspects est l’évolution que connaît la place du « religieux » (c’est-à-dire de la dimension religieuse) dans la vie humaine et comme conséquence le rôle joué par les symboles dans la vie humaine. Il s’agit d’une évolution qui prend sa racine dans l’enseignement même de Jésus. Et cela affecte toutes nos formes de vie religieuse.



Les premiers chrétiens ne pouvaient pas réaliser à quel point le message de Jésus était révolutionnaire. Ils vivaient dans un monde sacral. Pour ce monde sacral, à l'intérieur comme à l'extérieur du Judaïsme, le langage de l'appartenance religieuse et rituelle était plus important que le langage de la vie. Le centre de gravité était l'activité sacrale et rituelle, par laquelle les humains pouvaient entrer en relation avec Dieu. Pour Jésus, le centre de gravité n'était plus l'activité rituelle, mais bien la qualité de la vie quotidienne. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les premiers Chrétiens étaient considérés par les païens comme des "athées"!



En Occident, depuis le temps de Jésus, le centre de gravité s'est constamment déplacé de l'aire de l'expression religieuse et rituelle vers l'aire de la vie quotidienne. La prise de conscience de la liberté humaine a conduit à un sens plus profond de la responsabilité. Le temple de pierre prend toujours moins d'importance et les temples vivants en prennent toujours plus.



Notre vie chrétienne de tous les jours est l'endroit où nous sommes appelés tout d'abord à vivre ce message d'amour : nous devons devenir toujours plus conscients du fait que tout être humain, à cause même de son humanité, est un temple de l'Esprit.



De ce temple, Jésus est la pierre angulaire. Les difficultés que rencontre actuellement l'Église dans les vieilles chrétientés d'Europe occidentale et d'Amérique du Nord viennent peut-être du fait que sa lourde structure institutionnelle reposait souvent sur d'autres bases, qui se sont effritées.



A côté du phénomène de perte du sens chrétien, qui est réelle à notre époque, il faut remarquer un autre phénomène tout différent quoiqu’en apparence fort semblable, qui consiste précisément dans la continuation du glissement depuis le rituel vers la vie commencé avec Jésus. Pour beaucoup d'authentiques Chrétiens de nos jours la "pratique" religieuse consiste avant tout à incarner dans leur vie de tous les jours – sur leur lieu de travail comme dans leur famille – les exigences de l'Évangile. À un niveau plus profond, ce qui est changé en profondeur c’est la relation avec la dimension religieuse de l’existence et avec l’ordre des symboles. Lorsque les symboles – comme les symboles liturgiques, par exemple – ne parlent plus, la solution n’est pas de créer de nouveaux symboles, mais de savoir reconnaître et bien gérer la dimension symbolique – la valeur symbolique – de tous les éléments de notre vie courante



Ainsi toute la dimension rituelle et symbolique de beaucoup des éléments de notre vie religieuse – habit, clôture, forme des édifices -- s’en trouve profondément changée. .



5. L’évolution des classes



De la même façon, l’importance des classes dans l’Église s’est profondément modifiée depuis l’âge d’or de la « Chrétienté ».



Nos formes de vie monastique et religieuse se sont développées à l’époque de la Chrétienté, comme je l’ai dit plus haut. Cette période était caractérisée en grande partie par l’importance donnée aux rangs et aux classes non seulement dans la société, mais aussi dans l’Église. Des distinctions nettes entre clergé et peuple, entre moines, chanoines, mendiants et religieux en général étaient de grande importance. L’importance de ces distinctions a disparu de nos jours.



Ce nivellement a peut-être une origine et une valeur évangélique. Si Vatican II a élaboré une nouvelle théologie, c’est celle du Peuple de Dieu. Nous formons tous le peuple de Dieu en y vivant divers charismes et en les vivant de façons diverses. Personnellement je me demande si l’évolution actuelle de l’Église ne va pas dans un sens où ces distinctions seront de moins en moins importantes.



La pratique séculaire selon laquelle les communautés sont composées entièrement de femmes ou d’hommes, sont entièrement actives ou contemplatives, etc. ne sera probablement pas la seule forme de vie consacrée dans l’Église à l’avenir. Le fait est qu’une grande partie des groupements qui ont demandé l’approbation du Saint Siège au cours des dernières décennies ne sont pas des communautés au sens traditionnel, mais des communautés comprenant des personnes des deux sexes, des célibataires et des couples mariés, des laïcs et des prêtres. Comme la demande d’approbation est en général présentée à la Congrégation pour les Instituts Religieux et les Sociétés de vie apostoliques (appelée plus couramment la Congrégation pour les Religieux) celle-ci a en général trouvé comme solution d’approuver comme Institut religieux la partie de ce groupe faisant les voeux « religieux » traditionnels, et considérant tous les autres membres comme des associés, ce qui ne correspond pas en général à l’intuition primitive du ou des fondateurs. Mais il ne semble pas y avoir d’autre Congrégation romaine habilitée à approuver une société de ce genre. Évidemment l’Opus Dei a trouvé la solution en s’adressant plus haut et en obtenant d’être constitué en « prélature personnelle ».



Dans notre Ordre [cistercien], où nous n’avions pas dans le passé la tradition des « oblats » qu’ont les Bénédictins, s’est manifesté depuis une vingtaine d’année un mouvement de plus en plus fort de laïcs demandant à être associés à nos communautés. Ce n’est pas du tout un mouvement que nous avons provoqué nous-mêmes à cause du manque de vocations... Au contraire ce mouvement est venu des laïcs et beaucoup des communautés y ont été plutôt réticentes dans un premier temps. D’ailleurs il est particulièrement fort dans des pays où les vocations sont nombreuses, au Nigeria par exemple. Ces laïcs ne désirent pas simplement une pieuse association à une communauté religieuse. Ce ne sont pas non plus des personnes voulant aider des communautés dans le besoin. Ce sont plutôt des personnes, hommes et femmes, personnes mariées et célibataires qui se sont reconnues spirituellement dans le charisme spirituel de nos communautés, qui ne prétendent pas jouer au moine ou à la moniale, mais désirent incarner dans leur vie – aussi bien dans leur vie familiale que dans leur vie professionnelle – les valeurs qu’ils ont découvertes dans notre spiritualité. Je suis convaincu que l’Esprit Saint est en train de donner une nouvelle expression au charisme cistercien. Et je crois qu’il en est ainsi de beaucoup de communautés et d’individus.



6. les communautés nouvelles



C’est sans doute dans ce contexte qu’il faut parler de ce qu’on appelle les « Communautés nouvelles ». En étudiant l’histoire de la vie consacrée, on remarque aussi qu’aux moments charnières de l’évolution historique, apparaissent souvent de nombreuses fondations nouvelles. La plupart disparaissent et l’une ou l’autre recueille en quelque sorte tous les fruits de cette évolution. En général les formes plus traditionnelles qui ont la caractéristiques de survivre à toutes les crises, s’en trouvent elles-mêmes rénovées et revigorées.



Donc, à mon avis, il faut avoir à leur égard une attitude positive, accueillant avec reconnaissance tout ce qu’elles apportent de vie nouvelle ; mais exerçant aussi à leur égard, si elles l’acceptent le rôle de témoins d’une longue tradition. Si l’on en juge par ce qui s’est passé à toutes les époques semblables de crise et de créativité nouvelle, plusieurs de ces communautés disparaîtront ; quelques-unes fleuriront, recueillant les fruits de l’ensemble de l’évolution. Mais il ne faut pas conclure trop vite – comme le font certains évêques -- qu’elles sont LA voie de l’avenir et qu’elles remplaceront les communautés existantes comme si celles-ci appartenaient à un autre âge. En même temps, les communautés anciennes doivent se laisser interpeller et même rénover par ce dynamisme nouveau.



Évidemment, parmi les nombreuses communautés dites « nouvelles », -- comme parmi les communautés plus traditionnelles, il y a de tout. Dans l’ensemble elles ont – ce qui est normal – à la fois les qualités et les défauts de la jeunesse. Elles ont une grande vitalité, beaucoup de confiance en elles-mêmes et dans l’avenir, un désir ardent de s’engager dans le travail d’évangélisation et de conquérir le monde ; elles ont aussi comme tous les jeunes, une bonne dose de naïveté et il est parfois plutôt triste de les voir se casser le nez alors qu’un tout petit peu de consultation leur aurait évité de se buter sur des écueils par trop évidents.



Exemples de cette naïveté : plusieurs de ces communautés découvrent soudain le goût d’aller évangéliser l’Afrique. Tous ceux qui ont vécu ne fût-ce que quelques années en Afrique ou qui y sont allés d’une façon un peu fréquente au cours des vingt ou vingt-cinq années, savent à quel point les situations y sont complexes et comment il est facile à des « blancs » d’y faire plus de tort que de bien. Je trouve assez inquiètant de voir partir de petits groupes de jeunes des communautés nouvelles pour l’Afrique non seulement sans le minimum de préparation culturelle, mais aussi sans avoir consulté les communautés qui y sont présentes depuis de nombreuses années. Pourquoi chacun doit-il réinventer l’eau chaude ?



L’un des tests pour ces communautés nouvelles ou ce qu’on appelle les nouveaux mouvements est leur appartenance à l’Église ou leur lien avec l’Église locale.



7. le lien à l’Eglise locale



La vie religieuse dans le passé a toujours été fortement liée à l’Église locale. Vous pourrez évidemment tout de suite m’objecter que les Ordres anciens comme le mien étaient exempts. L’exemption – un mot qu’on ne retrouve plus dans le droit canon – signifiait simplement que certains Ordres dépendaient directement du Saint-Siège et non de l’évêque diocésain en tout ce qui concernait la vie interne de la communauté. Mais lorsqu’ils étaient établis dans une église locale, ils s’inséraient harmonieusement dans la vie de cette Église locale. Il en allait d’ailleurs à peu près de même de toutes les Congrégations actives....



Dans l’Église contemporaine, le défi est celui de la vitalité des Églises locales. Si l’on croît que l’Église universelle est faite de la Communion entre toutes les Églises locales, ce qui importera le plus sera l’intensité et la qualité spirituelle de la communion, peu importe la force ou la faiblesse numérique des Églises particulières. Si l’on donne plus d’importance à la puissance des structures ecclésiales, les églises petites et faibles seront de plus en plus marginalisées.



Le défi pour les religieux de nos jours est celui-ci. L’insertion dans l’Église locale. Ce n’est un secret pour personne que le très aimé pape Jean-Paul II a mis une très grande confiance dans ce qu’au delà des Alpes ont appelle les « mouvements nouveaux » -- tels que Opus Dei, Légionnaires du Christ, Néo-catéchuménat -- ayant une action souvent parallèle, semble-t-il, avec l’Église locale. En tout cas, leurs interactions avec l’autorité de l’Église locale sont moins bien rodées que celles des Instituts d’origine diocésaine ou des grands Instituts religieux traditionnels comme les Jésuites, les Dominicains, les Rédemptoristes, etc.



La vie contemplative se développe dans une Église locale lorsque la vitalité de cette Église locale lui permet de se développer. Ou plutôt, ce n’est que lorsqu’une Église locale a développé sa dimension contemplative qu’elle peut faire éclore en son sein des vocations contemplatives qui s’y développeront et s’y enracineront. Jusqu’à cette maturité de l’Église locale, toute fondation est une sorte de transplantation qui peut prendre racines ou ne pas prendre racines, et qui peut en tout cas prendre plus d’un demi-siècle avant de s’enraciner dans l’Eglise locale. (Cf. Martini, qui, pour des raisons purement et profondément ecclésiologiques a toujours eu beaucoup de difficultés – et ne s’en est jamais caché – avec l’influence de ces mouvements sur l’Église italienne dans son ensemble, sans que les évêques locaux ne puissent beaucoup intervenir).



8. un charisme de communion



Même si certains regroupement supra-diocésains et supranationaux ayant leurs propres engagements liés à une vision d’Église qui leur est propre ont pour le moment le vent dans les voiles , je crois que ce qui donnera une vitalité nouvelle à l’Église dans l’avenir sera la multiplication de grandes familles spirituelles reliant entre elles des personnes non seulement appartenant à diverses formes de vie, mais maintenant diverses appartenances communautaires à divers niveaux.



Le charisme qu’incarne la vie religieuse aujourd’hui sous toutes ses formes les plus variées est aussi ancien que le christianisme. Je suis absolument convaincu qu’il subsistera et fleurira dans l’Église d’aujourd’hui et de demain. Les formes dans lesquelles il s’est incarné et exprimé jusqu’à maintenant pourront changer et changeront probablement. Quelles que soient les formes que peuvent prendre nos institutions dans l’avenir, les défis qui se présentent à nous les religieux, quelle que soient nos formes de vie, il reste le même. C’est le charisme d’incarner l’Église dans le monde d’aujourd’hui. Parce qu’elle est une réponse à un appel d’amour, elle est essentiellement une vie de communion.



Communion avec Dieu dans la prière contemplative, communion avec des frères ou des soeurs (ou des frères et des soeurs) dans une vie communautaire ; communion avec l’Église locale dans laquelle nous vivons et, à travers elle avec l’Église universelle ; communion avec tous nos frères et soeurs en humanité, plus particulièrement avec les plus petits et les plus pauvres.



Une dimension importante de la communion touche les autres traditions religieuses. Un élément important de la réforme conciliaire a été l’ouverture au dialogue interreligieux. Quelques années après le Concile Rome a demandé aux grands ordres monastiques bénédictins et cisterciens d’assumer un rôle important dans le dialogue interreligieux particulièrement avec les grandes traditions religieuses de l’Orient comme l’hindouisme et le bouddhisme, qui ont une tradition monastique plusieurs fois millénaire et avec lesquelles les moines chrétiens peuvent entrer en dialogue au niveau de l’expérience spirituelle encore plus qu’à celui des philosophies ou des théologies. Ce dialogue interreligieux monastique a toujours été encouragé par le Secrétariat romain pour les relations avec les religions non-chrétiennes et plusieurs fois par Jean-Paul II lui-même en particulier lors de la visite de moines non-chrétiens en Occident mais n’a pas toujours reçu beaucoup d’encouragements de la part d’autres dicastères romains.



On parle beaucoup de nos jours de la Constitution Européenne qui risque bien de n’être jamais votée – qui risque bien de n’être jamais mise en pratique, puisqu’elle devrait pour cela être votée par les 25 pays membres, ce qui serait un vrai miracle. Avec cette Constitution ou non l’Europe est en train de se faire, péniblement, lentement et douloureusement. Que les racines chrétiennes de l’Europe soient mentionnées dans ce texte a son importance sans doute mais reste somme toute secondaire. (Hans Küng rappelait récemment les racines islamiques de l’Europe – cf. Averroès en particulier). Le plus important est que les valeurs et les principes chrétiens animent cette Europe nouvelle en gestation. Que cela se fasse ou non dépendra de chacun des chrétiens et d’une façon particulière de chacun des religieux.



Notre forme particulière de vie chrétienne qu’est la vie religieuse est un moyen qui nous est « donné », d’être un ferment chrétien dans la pâte humaine. Durant des siècles les religieux ont rempli un grand nombre de rôles de suppléances. Ainsi, durant une grande partie de l’Antiquité et du Moyen-Âge, alors que les chefs politiques ne pensaient qu’à étendre ou à défendre leurs empires, les monastères étaient les seuls lieux ayant suffisamment de stabilité pour que s’y développe ou se préserve une culture humaine. Ils ont eu durant des siècles le monopole de l’enseignement, non parce qu’ils l’avaient accaparé, mais parce que personne d’autre n’y pensait ou ne pouvait s’en occuper. Puis sont venues les Universités qui ont pris la relève. Au cours des derniers siècles, dans la plupart de nos pays, la majeure partie de l’enseignement des enfants, des soins hospitaliers et des aides sociales étaient fournies par des congrégations religieuses. Presque tout cela est maintenant entre les mains de l’Était ou en tout cas de laïcs.



Ce sont là autant de secteurs où la présence des religieux est essentielle, en tant que témoins de l’Évangile et de la foi en Jésus-Christ.



Mais ce qui reste et restera toujours la dimension essentielle de la vie religieuse, c’est la communion d’amour avec Jésus de Nazareth, communion incarnée dans toutes les autres formes de communion que j’ai mentionnées.



Je suis convaincu que la vie religieuse restera dans son ensemble fidèle à cette mission ; et je suis convaincu qu’elle a un avenir important dans l’Église et le peuple de Dieu.







Armand VEILLEUX, ocso

Abbé de Scourmont
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Enlui




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MessageSujet: Re: monachisme orient et occident quel avenir?   monachisme orient et occident quel avenir? EmptyJeu 27 Mai - 8:19

Je n'ai pas lu tout.

Je crois bien à un renouveau du monachisme grâce à la participation de laïcs.

Je crois qu'un retour aux premières communautés chrétiennes sera une direction à venir,et même si c'est en dehors du monachisme:communautés ouvertes,membres ayant des professions.
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